Les situations individuelles qui ne font apparaître ni une cause durable dans le mauvais fonctionnement d'un service, ni une défectuosité de la règle appliquée dans l'espèce par l'Administration, sont à l'évidence les plus nombreuses et constituent pour ainsi dire le " pain quotidien " de l'institution. Leur redressement, quand il n'a pas requis l'usage du pouvoir de recommandation et de proposition défini à l'art. 9 de la loi du 3 janvier 1973, forme à son tour le principal - du moins en volume - des succès obtenus par le Médiateur.
Suivant leur résultat ou leur objet, les interventions du Médiateur en ce vaste domaine se répartissent en quatre catégories.
Elles peuvent avoir abouti :
- au déblocage d'un dossier en souffrance ;
- au redressement d'une erreur de l'Administration ;
- à un assouplissement de son attitude.
Plus rarement, elles peuvent avoir eu pour objet le contrôle de la régularité de certains actes administratifs ou l'interprétation du droit applicable en certaines matières.
Ces quatre catégories d'actions donnent lieu à un commentaire détaillé, que l'on trouvera plus avant (cf. Annexe A). Mais, dès maintenant, les points suivants méritent d'être soulignés :
Les organismes de sécurité sociale continuent d'être responsables de nombreux retards dans le traitement des affaires. Cette situation, si elle ne se justifie pas, s'explique par la complexité de la réglementation et de l'organisation des services. D'importants progrès peuvent toutefois être attendus de la généralisation du procédé dit de " préliquidation " de la pension.
La lenteur administrative n'en apparaît pas moins comme un phénomène général : les délais excessifs que l'on constate dans l'exécution et le paiement de travaux à la charge de collectivités publiques et les réponses tardives de l'Administration fiscale aux recours gracieux qui lui sont soumis en offrent deux exemples notables.
Le retard à répondre est d'autant plus choquant que, dans de nombreux cas, l'instruction de l'affaire par le Médiateur a fait apparaître que la demande de l'intéressé était fondée, et qu'elle aurait donc pu être satisfaite sans délai.
L'Administration peut commettre des erreurs, mais il est regrettable que, lorsqu'on lui en signale une, elle n'en tienne souvent aucun compte, ou pour ainsi dire qu'un compte partiel : ainsi de l'erreur constatée dans un service, mais non " répercutée " dans un autre, pourtant également concerné.
Il arrive que la position prise par l'Administration dans une affaire se révèle trop rigide - soit que le service interprète de façon exagérément restrictive les dispositions applicables à l'espèce, soit que son appréciation des circonstances mêmes de l'affaire apparaisse rigoureuse à l'excès, soit encore qu'ayant très correctement réglé le cas, un peu plus de souplesse l'eût conduit à plus d'équité.
Mais il faut dire que souvent l'intervention du Médiateur a permis d'obtenir l'assouplissement souhaité. On notera à ce propos que les reproches d'inflexibilité si souvent adressés aux services fiscaux apparaissent très généralement mal fondés.
Le Médiateur a pu, dans certains cas, faire admettre à l'Administration qu'elle fondait sa décision sur une réglementation ou une jurisprudence mal comprise, voire sur une doctrine erronée. Il a été amené aussi à lui demander de prendre un texte interprétatif d'une réglementation obscure.
2. Les recommandations du Médiateur
Depuis la fin de 1974 et jusqu'au 31 décembre 1975 le Médiateur a émis, en exécution de l'article 9 de la loi du 3 janvier 1973, dix-sept recommandations tendant au redressement d'une situation individuelle (A noter que deux d'entre elles s'accompagnaient d'une " proposition tendant à donner une portée réglementaire à la mesure proposée en faveur du réclamant ").
Sur ce total :
- six ont recueilli l'accord de l'Administration concernée et, comme par le passé (Cf. Rapport de 1973 ; Rapport de 1974), sans qu'il soit besoin pour le Médiateur de les rendre publiques en suivant la procédure prévue au second alinéa de l'article 9 précité ;
- dix n'ont pas encore fait l'objet d'une réponse de l'Administration ou bien font l'objet de divergences avec celle-ci ;
- une a été abandonnée par le Médiateur qui s'est finalement rangé aux arguments développés par l'Administration.
Les recommandations auxquelles l'Administration a fait droit ont abouti aux résultats suivants. Le Médiateur a obtenu :
du Ministre de l'Economie et des Finances qu'il accorde à un ex-receveur des P.T.T. en Algérie le paiement de remises sur placement de bons du Trésor au titre d'opérations effectuées avant l'indépendance.
Le Ministre n'a cependant pas accepté d'étendre la solution retenue à tous les comptables intéressés, ce que le Médiateur juge critiquable ;
du Ministre de la Défense qu'il admette sa responsabilité en matière de dommages provoqués par un " bang " supersonique (Dans une seconde affaire du même ordre, le Médiateur s'est rangé aux arguments qui lui étaient opposés (cf. supra)) ;
du Ministre des Affaires étrangères et du Ministre de l'Economie et des Finances que l'Etat français prenne en charge le remboursement - sous certaines conditions - des frais de mission exposés par des coopérants servant en Algérie ;
du Ministre de l'Equipement, qu'il accepte de réparer le préjudice subi par un réclamant du fait qu'il lui avait été délivré un permis de construire irrégulier ;
du Ministre de l'Agriculture, qu'il accepte de réviser sa position sur la portée juridique du certificat d'attribution de l'indemnité viagère de départ et de le considérer comme un acte créateur de droits ;
du Ministre de l'Economie et des Finances, le réexamen de la situation d'un retraité, dont l'invalidité pourrait ainsi être reconnue comme imputable au service ;
L'ensemble des recommandations du Médiateur émises pendant la période ci-dessus visée, qu'elles aient été ou non déjà suivies d'effet, est analysé en détail plus avant (cf. Annexe A).
1. Le concours de l'Administration (Cf. infra, Annexe A)
Le mauvais fonctionnement de certains services - notamment des organismes de sécurité sociale - peut naturellement être imputé au fait qu'ils sont surchargés de travail. Mais cette explication masque trop souvent un défaut d'organisation auquel il serait pourtant facile dans bien des cas de remédier, n'étaient la passivité et le manque d'initiative des personnels responsables.
Ainsi de cette caisse de sécurité sociale qui ne savait que faire de l'attestation d'activité (désormais annuelle) de l'assuré, lorsque ce document ne lui parvenait pas joint à la première demande de remboursement... L'intervention du Médiateur a réveillé chez ses responsables l'imagination nécessaire à la solution de ce petit problème.
Le Médiateur a également obtenu :
que l'autorité de tutelle soumette à des contrôles une caisse qui se faisait remarquer par sa lenteur à répondre ou à instruire les dossiers ;
que l'on aménage les horaires de convocation aux séances de la Commission de suspension du permis de conduire, de manière à éviter aux contrevenants des attentes parfois excessives.
L'habitude administrative (et judiciaire) de convoquer tout le monde à la fois pour une séance qui peut durer jusqu'à une heure tardive a donc été au moins une fois abandonnée.
2. Les propositions du Médiateur
En exécution de l'article 9 précité de la loi du 3 janvier 1973, le Médiateur a émis, en 1975, trois propositions tendant à l'amélioration du fonctionnement d'un service et qui ont toutes reçu un accueil favorable des services concernés.
Deux de ces propositions concernaient le secrétariat d'Etat aux Postes et Télécommunications :
Ce département s'est engagé à améliorer l'information donnée aux candidats à un abonnement téléphonique, notamment en ce qui concerne la date de prise d'effet des tarifs de la " taxe de raccordement " ;
Cette même expression de " taxe de raccordement " pouvant prêter à confusion, dans la mesure où elle suggère l'existence de travaux à entreprendre - ce qui n'est pas toujours le cas - le département a accepté de la remplacer par l'expression nouvelle de " frais forfaitaires d'accès au réseau ".
La troisième, adressée au ministère de l'Economie et des Finances, proposait à ce département de renforcer la liaison entre ses services, à la suite d'une affaire dans laquelle deux bureaux différents, saisis d'une même question, avaient pris deux décisions contradictoires. Bien qu'il se soit agi d'un cas isolé résultant de circonstances exceptionnelles, le Ministre a fait savoir au Médiateur qu'il prenait les mesures propres à empêcher le renouvellement de pareils errements.
Ces trois propositions sont analysées en détail ci-après. (Cf. Annexe A).
Les précédents Rapports ont montré comment, par la force des choses, le Médiateur avait été conduit, au-delà du cas individuel, à s'intéresser à la règle, législative ou de nature réglementaire, sur laquelle l'action de l'Administration s'appuie, et le cas échéant, à suggérer aux pouvoirs compétents la modification de cette règle.
L'activité du Médiateur en la matière se situe dans un contexte et présente une spécificité sur lesquels le Rapport de 1974 a particulièrement insisté. On se contentera ici de rappeler que les " réformes " qu'il suggère ont pour caractéristique d'être toutes fondées, non sur des considérations aprioristes, mais sur des situations concrètes vécues par les administrés, ce qui confère au Médiateur une place privilégiée par rapport à tous ceux qui concourent, en France, à l'entreprise de " réforme administrative " au sens large de cette expression.
On ajoutera que sa tâche ne consiste évidemment pas à se substituer au législateur ni au Gouvernement mais à leur signaler ici un vide juridique, là une anomalie ou une incohérence, ailleurs un manquement à l'esprit d'une législation.
Dans cette tâche, trois soucis essentiels l'animent.
Faire ce qui est en son pouvoir pour que le corps des lois et règlements assure de façon efficace la protection de l'administré, notamment en ce qui concerne l'information qui lui est due.
Contribuer à introduire dans cet ensemble de règles davantage encore de justice sociale, voire de justice tout court.
Aider enfin à rapprocher le droit du fait, en proposant la réforme de dispositions dépassées.
Depuis son entrée en fonctions, le Médiateur a émis 90 propositions de réforme. Sur ce total :
- 22 ont été satisfaites - c'est-à-dire (cf. infra) que les suggestions qu'elles contenaient ont été sanctionnées par une modification de la législation ou de la réglementation ;
- 7 doivent être considérées comme partiellement satisfaites ;
- 15 ont été différées ;
- 46 sont encore en cours d'examen.
Les propositions en cours sont analysées ci-après (cf. Annexe A).
On se bornera ici à énumérer, en rappelant brièvement leur objet, les propositions satisfaites et les propositions partiellement satisfaites (Les propositions de ces deux catégories dont il n'est pas fait mention aux Rapports de 1973 et de 1974 sont également analysées à l'Annexe A).
Les premières seront classées d'après la nature de l'acte (loi, arrêté, instruction, décret ou circulaire) qui a apporté la modification souhaitée.
Propositions satisfaites
1. Modifications apportées par une loi
- Affaires sociales :
problèmes de coordination et d'harmonisation entre divers régimes (Cf. Rapport de 1973 ; Rapport de 1974) : loi n° 75-3 du 3 janvier 1975 portant diverses améliorations et simplifications en matière de pensions ;
problèmes de l'harmonisation générale (Cf. Rapport de 1973, Rapport de 1974 ; cf. également infra, Annexe A) : loi n° 74-1094 du 24 décembre 1974 prévoyant l'harmonisation progressive de tous les régimes avant le 1er janvier 1978 (cf. infra, Annexe A) ;
conditions d'attribution de l'allocation d'orphelin (Cf. Rapport de 1973 ; Rapport de 1974) : loi n° 75-6 du 3 janvier 1975 et décret n° 75-244 du 17 avril 1975 ;
allocation d'éducation spécialisée des mineurs infirmes (Cf. Rapport de 1973, Rapport de 1974 ; cf. également infra, Annexe A) : loi n° 75-534 du 30 juin 1975, art. 9, décrets nos 75-1195 et 75-1196 du 16 décembre 1975 ;
prise en charge par l'Etat des frais de formation des handicapés (Cf. Rapport de 1973) : loi n° 75-534 du 30 juin 1975, dite d'orientation en faveur des handicapés ;
modifications concernant la constitution et le calcul des pensions de vieillesse (Cf. Rapport de 1973) : loi n° 75-3 du 3 janvier 1975, précitée ;
allocation de maternité (Cf. Rapport de 1974) : loi n° 75-3 du 3 janvier 1975 et décret n° 75-244 du 14 avril 1975.
- Economie et Finances :
invalidité et calcul de l'impôt sur le revenu (Cf. Rapport de 1973, Rapport de 1974) : art. 2 de la loi de finances pour 1975 ;
exonération temporaire partielle de la patente (Rapport de 1973, Rapport de 1974) : loi n° 75-678 du 29 juillet 1975 et décret n° 75-975 du 23 octobre 1975.
- Equipement :
élaboration des P.O.S. et gel des terrains (Cf. infra, Annexe A) : loi n° 74-1117 du 27 décembre 1974.
- Justice :
lenteurs des procédures de divorce (Rapport de 1973, Rapport de 1974) : loi du 11 juillet 1975 et décret du 5 décembre 1975.
- Information :
réception des émissions télévisées (Rapport de 1973 ; Rapport de 1974) : loi n° 74-696 du 7 août 1974 (art. 23).
2. Modifications apportées par un décret
- Affaires sociales :
recouvrement des cotisations d'assurance-maladie des travailleurs non salariés, sanctions en cas d'oubli de paiement (Cf. Rapport de 1973 ; Rapport de 1974, cf. également infra, Annexe A) : décret n° 75-1109 du 2 décembre 1975 relatif à l'application de l'art. 5 de la loi n° 66-509 du 12 juillet 1966 modifiée ;
imputation sur la retraite des cotisations d'assurance maladie des travailleurs non salariés (Rapport de 1973, ibid. ; Rapport de 1974) : décret n° 74-810 du 28 septembre 1974 et décret n° 75-85 du 11 janvier 1975 ;
prise en compte des cotisations de l'assurance-vieillesse au titre de l'année au cours de laquelle le travail a été fourni (Cf. infra, Annexe A) : décret du 24 février 1975 (art. 10) modifiant l'art. 6 du décret du 29 décembre 1973.
- Justice :
amélioration du fonctionnement de la juridiction prud'homale (Rapport de 1973 ; Rapport de 1974) : décret n° 74-783 du 12 septembre 1974 ;
amélioration des procédures de l'aide judiciaire (Rapport de 1973 ; Rapport de 1974) : décret n° 75-350 du 14 mai 1975.
3. Modifications apportées par un arrêt
- Economie et Finances :
douanes, conditions d'utilisation en France de véhicules immatriculés à l'étranger (Cf. Rapport de 1973 ; Rapport de 1974) : arrêté du 23 mai 1975 (J.O. du 1er juin).
4. Modifications apportées par une instruction ou une circulaire
- Affaires sociales :
conditions d'attribution de l'aide spéciale compensatrice prévue par la loi du 13 juillet 1972 en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans (Cf. infra, Annexe A) : instruction du 11 janvier 1975 prise en application de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972.
- Economie et Finances :
accélération de l'application de l'article 73 de la loi de Finances pour 1969 relatif à la péréquation de certaines retraites (Cf. Rapport de 1973 ; Rapport de 1974 ; cf. également infra, Annexe A) circulaire du 6 février 1975.
- Anciens combattants et victimes de guerre :
paiement du supplément familial de pension à une autre personne que le titulaire de la pension de veuve de guerre (Cf. Rapport de 1973 ; Rapport de 1974 ; cf. également infra, Annexe A) : instruction n° 75-74 B 3 du 11 juin 1975.
Propositions partiellement satisfaites
- Affaires sociales :
assurance-vieillesse des professions libérales (Cf. Rapport de 1973 ; Rapport de 1974) ;
droit aux prestations familiales pour un enfant accomplissant sa scolarité hors du territoire français (Cf. Rapport de 1973 ; Rapport de 1974) ;
amélioration de l'aide publique en cas de chômage partiel (Cf. infra, Annexe A).
- Economie et Finances :
régime fiscal des résidences secondaires (Rapport de 1973 ; Rapport de 1974) ;
invalidité et calcul de l'impôt sur le revenu : l'art. 2 de la loi de finances pour 1976, cité ci-avant, est loin d'avoir réglé tous les problèmes qui se posent en cette matière (Rapport de 1973 ; Rapport de 1974 ; cf. aussi infra, Annexe A) ;
problème posé, par l'annualité des impositions locales (Rapport de 1973 ; Rapport de 1974 ; également infra, Annexe A).
- Equipement :
versement d'intérêts au vendeur à l'amiable d'un immeuble en vue d'une opération d'utilité publique (Cf. infra, Annexe A).
A la vérité, la presque totalité des propositions dont il vient d'être question se sont rencontrées avec des initiatives déjà prises par l'Administration elle-même et qui souvent avaient déjà reçu la sanction d'une disposition récente. Il était à cet égard d'autant moins probable que le Médiateur put se trouver seul à l'origine d'une " réforme " que la plupart de ses propositions intéressent, comme il est naturel, des matières dont notamment la matière sociale, qui sont actuellement le terrain d'un vaste mouvement législatif et réglementaire.
Mais il n'en retire pas pour autant le sentiment que ses interventions aient été inutiles :
D'abord parce que c'est à son initiative propre que l'on doit rapporter certaines mesures - comme l'émission d'une circulaire ou d'une instruction, la simplification d'une procédure (Cf. supra et infra, Annexe A)... - de faible ampleur assurément, mais qui ont permis de compléter le dispositif d'application de la mesure principale.
Ensuite - et c'est le cas des propositions dites partiellement satisfaites - parce que même mis en présence d'une disposition législative ou réglementaire allant dans le sens qu'il avait souhaité, il conserve le droit de juger cette disposition encore insuffisante, eu égard notamment aux desiderata que les administrés lui ont exprimés, et ne manquera pas alors de poursuivre son intervention auprès de l'Administration concernée. On a vu aussi que certaines de ces propositions, même rejetées par l'Administration, n'étaient que provisoirement abandonnées.
En définitive, même si le Médiateur n'est pas le seul à entreprendre des réformes, au moins y contribue-t-il par des avis toujours fortement motivés auxquels les pouvoirs publics peuvent ne pas se ranger, mais qu'il leur est difficile d'ignorer.
C'est d'ailleurs dans le but de renforcer l'audience de ses propositions qu'il les transmet depuis peu aux commissions compétentes des Assemblées parlementaires.
Le problème de l'information du public (Cf. Rapport de 1973), dont le Médiateur a déjà déclaré qu'il était fondamental - le plus important, peut-être, de tous ceux dont il a à connaître - apparaît évidemment loin d'être complètement résolu.
Mais les actions que le Médiateur a menées et continue de mener en ce domaine, jointes aux initiatives de plus en plus nombreuses et concrètes dont il a par ailleurs connaissance, sont autant de jalons sur la voie d'une solution qui n'apparaît plus, aujourd'hui, aussi hors de portée que lors de la création de l'institution.
C'est pourquoi, au terme d'une étude qu'on trouvera développée, (cf. infra, Annexe A, p. 86), et qui s'appuie notamment sur les conclusions de la " Commission de coordination de la documentation administrative ", constituée auprès du Premier Ministre, il propose qu'une loi vienne, le plus tôt possible, poser en principe général le droit de tout administré à l'information avec les conséquences qui en découlent quant au régime de communication des documents administratifs, à la motivation des décisions administratives et à la nécessité de former nos fonctionnaires au " devoir d'information ".
Dès maintenant, obligation pourrait être faite à l'ensemble des Administrations, par la voie réglementaire, d'avoir à prendre, chacune en ce qui la concerne, les mesures propres à satisfaire à ces trois exigences.
S'il n'y a là qu'une proposition - encore que très pressante - du moins peut-on espérer qu'un résultat est en vue.
La section II de l'annexe A se présente sous la forme d'une série de monographies consacrées chacune à un problème - parfois très important - qu'un nombre suffisant de réclamations convergentes ont posé au Médiateur, mais dont l'étude n'a pas encore débouché sur des propositions concrètes faites au ministère compétent. Au moins tous ces problèmes sont-ils appréhendés, et souvent de façon assez solide et complète pour que la solution qu'ils pourraient recevoir se dessine avec une suffisante précision.
On trouvera dans les pages suivantes un résumé des études auxquelles ils ont donné lieu.
A. LA MISE EN CAUSE DE PRINCIPES
Dans sa critique de la règle législative ou réglementaire, le Médiateur a pu aller jusqu'à la remise en question de plusieurs des principes qui dominent notre droit positif, et cela depuis les plus généraux (la non-rétroactivité de la règle de droit, les principes régissant le régime des forclusions, ou la situation de l'Etat débiteur), jusqu'à ceux dont l'application est limitée à un secteur particulier de la législation (annualité de l'impôt, intangibilité des pensions de sécurité sociale une fois liquidées, principe présidant à l'harmonisation des différents régimes de sécurité sociale).
Cette remise en question, bien entendu, ne saurait être que partielle : on se doute qu'elle vise davantage l'application du principe que le principe lui-même. Mais certaines des critiques formulées par le Médiateur paraîtront peut-être suffisamment nourries pour que les pouvoirs compétents se persuadent que la " majesté " d'un principe ne doit pas arrêter la réflexion ni condamner d'avance toute mesure de progrès.
1. Principes de portée générale(Cf. infra, Annexe A)
L'application systématique, principalement dans la législation sociale, du principe de non-rétroactivité de la règle de droit, a entraîné en grand nombre des situations contraires à l'équité dont le Parlement s'est ému à plusieurs reprises.
Le Médiateur a demandé au Conseil d'Etat sur le sujet une étude qui n'est pas encore achevée. Mais, dès maintenant, il croit pouvoir avancer que cette application systématique est dépourvue de tout fondement juridique ; il propose qu'elle laisse place à une conception beaucoup plus souple qui permettrait aux pouvoirs publics d'adopter des solutions moins dogmatiques, mieux adaptées à la réalité des situations, et en un mot plus humaines.
Ainsi le progrès de notre législation, notamment en matière sociale, pourrait-il se faire avec plus d'équité, de justice, et même de cohérence.
La forclusion vient frapper nombre d'administrés d'une façon que l'on peut estimer inéquitable, voire injuste. Cela pose un problème d'information (Cf. Rapport de 1973) et un problème d'aménagement des délais. A ce dernier point de vue, il paraît notamment difficile de justifier les véritables privilèges que la loi accorde à l'Etat débiteur ou créancier.
Le Médiateur estime donc souhaitable de développer au maximum l'information des titulaires de droits soumis à péremption et d'uniformiser dans la plus large mesure possible les délais de cette péremption. C'est dans cette double perspective qu'il a demandé au Conseil d'Etat d'étudier la question.
Le fait de n'être qu'exceptionnellement tenu au versement d'intérêts de retard constitue une autre prérogative de l'Etat débiteur.
Observant qu'une jurisprudence récente du Conseil d'Etat relative à la matière fiscale (arrêt du 30 octobre 1975) a commencé de battre en brèche le principe selon lequel l'Etat ne peut être déclaré débiteur d'intérêts moratoires que lorsqu'il y a eu un jugement, le Médiateur estime que les exceptions à ce principe pourraient s'étendre à bien d'autres domaines (ventes effectuées dans le cadre d'une opération d'utilité publique, ou même simples ventes amiables, mesures de désintéressement gracieux, par exemple).
Il conclut que maintenir intacte la situation actuelle ne pourrait que confirmer les administrés dans le sentiment que certaines prérogatives de la puissance publique ne se justifient pas et que l'équité n'est pas ce qui caractérise leurs rapports avec celle-ci.
2. Principes régissant un secteur particulier de la législation (Cf. infra, Annexe A)
L'application du principe de l'annualité de l'impôt fait l'objet d'une étude au terme de laquelle le Médiateur attire particulièrement l'attention sur la situation des travailleurs licenciés en fin d'année civile : l'indemnité de préavis qui leur est versée, ayant le caractère d'une rémunération, est rattachée par les services fiscaux à l'année du licenciement, ce qui ne peut manquer d'obérer la situation financière de l'intéressé pendant l'année suivante.
Le Médiateur propose, soit l'étalement de ce " revenu exceptionnel ", soit le rattachement de l'indemnité aux revenus de l'exercice suivant l'année du licenciement.
En matière de sécurité sociale règne un autre principe qui est celui de l'intangibilité des pensions une fois liquidées.
Il y a une intangibilité " absolue " qui fait que dès l'instant qu'un assuré a reçu notification de la liquidation de ses droits à l'assurance-vieillesse, cette liquidation - pourvu qu'elle ait été effectuée sur sa demande expresse - ne peut plus être remise en cause, notamment pour tenir compte de versements postérieurs à la date d'arrêt du compte. Cela veut dire en clair qu'un travailleur ne peut revenir sur sa décision de retraite, sous peine de reprendre une activité sans profit pour ses vieux jours.
Il existe aussi une intangibilité " relative " qui s'applique aux personnes ayant cotisé aux assurances sociales entre le 1er juillet 1930 et le 31 décembre 1945, mais que des circonstances diverses empêchent d'apporter la preuve, qui leur incombe, du versement de leurs cotisations.
La conclusion de l'étude est que, sans vouloir proposer l'abandon du principe en question encore que, tant du point de vue de la logique que de celui du droit, il ne paraisse nullement irréprochable - force est de constater que les mesures administratives ou réglementaires, récemment prises pour atténuer la rigueur de ses effets (" précalcul " de la retraite à 59 ans ; décret du 24 février 1975 permettant aux employeurs d'effectuer la régularisation de cotisations arriérées), paraissent bien tardives ou bien timides.
L'harmonisation progressive des divers régimes de sécurité sociale fonctionnant en France, prescrite par la loi n° 74-1094 du 24 décembre 1974, ne se fait pas dans des conditions idéales de rigueur et d'équité.
C'est ainsi qu'une série de mesures récentes, prises en faveur des ressortissants du régime général ou de régimes assimilés à celui-ci pour la circonstance, n'ont pas bénéficié aux ressortissants de certains régimes spéciaux (agents des secteurs public et parapublic, principalement). Il continue donc de se créer des déséquilibres directement contraires à la notion même d'harmonisation.
Pour le Médiateur, cette harmonisation vient bien tard - alors que dès la création en 1945 de la sécurité sociale, la fusion de tous les régimes avait été posée en principe - et ne saurait en tout cas aboutir à une égalité effective des citoyens devant les risques sociaux avant de longues années.
Le moment lui semble donc venu de repenser totalement notre système de sécurité sociale ; il propose dans ce sens une réforme d'une grande ampleur, centrée sur la création d'un régime unique de base, assurant à tous les Français des prestations minimales identiques, financé dans des conditions nouvelles, mais n'excluant pas le maintien ni le développement de régimes complémentaires.
A tout le moins, les dispositions libérales récemment prises, et notamment celles de la loi n° 75-3 du 3 janvier 1975, devraient être étendues à l'ensemble des régimes.
Il s'agit ici de problèmes d'un niveau théorique moins élevé mais qui n'en ont pas moins une grande importance. Ce sont ceux que soulèvent les conditions de déroulement ou le caractère même de certaines procédures : procédures subies en matière de cadastre ; procédures du remembrement ; aspects particuliers du problème posé par les procédures d'enquêtes publiques ; procédure de transmission au Parquet des procès-verbaux dressés par les fonctionnaires chargés de l'Inspection du Travail ; caractère non contradictoire de certaines mesures d'" instruction administrative " ; procédures juridictionnelles, en général, et leur lenteur.
Là encore on pourra rencontrer des critiques et des conclusions assez précises pour que des solutions s'en dégagent.
En matière de cadastre, l'Administration devrait associer aussi étroitement que possible les propriétaires concernés aux opérations de rénovation en cours ou à venir, de manière à réduire l'important contentieux que l'on connaît actuellement en cette matière. Si un litige s'élève malgré tout, elle devrait être invitée à prendre parti dans la procédure engagée. Il paraît en effet anormal qu'elle se contente, comme à l'heure actuelle, de renvoyer les parties dos-à-dos alors que l'origine du litige est une erreur figurant dans les documents cadastraux et par conséquent de son fait.
Les procédures suivies en matière de réorganisation foncière et de remembrement sont complexes et lentes : l'étude du Médiateur en donne les raisons.
Mais ce qui rend le problème délicat, c'est que cette complexité et cette lenteur ont le plus souvent pour origine le souci de protéger les droits des propriétaires concernés, il semble donc difficile de les réduire, sans du même coup porter préjudice aux intéressés.
C'est pourquoi le Médiateur estime que demander aux Préfets de surveiller davantage l'activité des commissions en cause serait déjà de nature à hâter le déroulement des procédures tout en maintenant aux intéressés la légitime garantie de leurs droits.
Toutefois le Médiateur suggère qu'une procédure d'urgence soit instituée afin d'éviter que la décision de la commission départementale puisse être remise en cause trop tardivement pour qu'il soit possible d'en tenir compte sans provoquer une redistribution des terres pratiquement irréalisable.
L'une des propositions de réforme du Médiateur a trait au problème posé par les procédures d'enquêtes publiques (cf. infra, p. 75).
L'étude figurant ci-après (cf. Annexe A, p. 119), attire l'attention sur deux aspects particuliers de ce problème : l'époque de l'enquête, trop souvent fixée dans une période de vacances, ou englobant de nombreux jours de vacances ; l'absence trop souvent constatée, du commissaire enquêteur au bureau où se déroule l'enquête.
Le Médiateur considère que de telles pratiques dénaturent en fait la procédure elle-même et inspirent aux intéressés la conviction que, de toutes façons l'Administration n'en fera qu'à sa guise : il y voit un obstacle d'importance aux progrès de l'esprit de concertation.
A la suite d'une réclamation, le Médiateur a été amené à étudier les conditions de transmission au Parquet des procès-verbaux d'infraction dressés par les fonctionnaires chargés de l'Inspection du Travail.
Il lui est apparu que les " supérieurs " de ces fonctionnaires (les directeurs départementaux ou régionaux) ne pouvaient en aucun cas s'opposer à cette transmission : ils ont simplement la possibilité de joindre leurs appréciations personnelles à un procès-verbal sur lequel ils seraient en désaccord au fond.
Ces conclusions ont été transmises au Premier Ministre.
Lors d'un litige avec l'Administration un particulier peut se voir opposer une " mesure d'instruction " (expertise d'évaluation d'un dommage, par exemple), unilatéralement décidée, conduite et exploitée par la partie adverse.
Il lui faut donc accéder au stade contentieux - ce qui n'est pas souhaitable - pour obtenir les garanties d'une instruction vraiment contradictoire.
Cet état de choses choque le Médiateur qui souhaite vivement que ce qu'on peut appeler les " mesures d'instruction administrative " puissent se dérouler suivant une procédure plus équitable.
De nouveau (cf. les précédents Rapports du Médiateur) des réclamations ont attiré l'attention sur la lenteur du déroulement des procédures juridictionnelles.
Après avoir analysé les diverses causes de ces lenteurs, le Médiateur ne peut que pousser à son tour un cri d'alarme devant les déplorables conditions de fonctionnement de certaines de nos juridictions, en particulier administratives, qui subissent une pénurie d'effectifs chronique.
Il demande par ailleurs que le problème des mesures d'instruction et des délais qu'elles requièrent fasse l'objet d'une étude approfondie : on ne peut en effet qu'être frappé de la place que tiennent, parmi les causes du retard à juger, le manque de diligence et dans certains cas, les erreurs des experts commis.
On retrouve ici, une nouvelle fois, le Médiateur dans son rôle d'interprète du droit (cf. supra, p. 13).
On citera, pour mémoire, le problème posé par la valeur juridique du certificat d'attribution de l'indemnité viagère en Agriculture (cf. p. 16 et 47).
L'autre problème est celui de la valeur juridique et même de l'utilité du certificat d'urbanisme.
La loi n° 71-581 du 16 juillet 1971 et le décret n° 72-613 du 3 janvier 1972 (art. L 410 et suivants du Code de l'urbanisme) ont voulu faire de ce document un acte administratif véritable. Mais les garanties qu'il comporte pour le constructeur se révèlent souvent illusoires : n'étant pas soumis à une publicité obligatoire, l'Administration peut le retirer sans condition de délai lorsqu'il est illégal, et les tiers le contester à tout moment ; de plus, les dispositions concernant les limitations administratives au droit de propriété, invoquées lors de la délivrance du certificat, peuvent être remises en cause également à tout moment.
Le Médiateur en conclut à la nature ambiguë du certificat d'urbanisme : plus qu'une notice de renseignements, mais moins qu'un acte administratif au sens plein tel que le permis de construire.
Et si l'on en faisait un acte véritablement créateur de droits, la question se poserait alors de savoir s'il conserverait une utilité pratique vis-à-vis de ce dernier.
En définitive, le Médiateur doute que la multiplicité des documents concernant le droit de construire soit de nature à accroître la sécurité juridique recherchée à la fois par les constructeurs et par les tiers.
Comme au cours des années précédentes, le Médiateur a été mis en présence, dans un nombre appréciable de cas, des défauts les plus classiques de l'Administration et des traits que l'on peut appeler génériques de son comportement.
Les précédents Rapports ont énuméré ces traits ou ces défauts : le mauvais accueil fait au public, l'insuffisance de l'information des administrés, la lenteur, le silence, l'excès de formalisme et le " légalisme ", la passivité, le manque d'initiative, l'irrégularité enfin, pouvant aller de la simple erreur à la faute caractérisée.
La liste est demeurée la même en 1975, et le contenu de ses rubriques substantiel : l'étonnant serait qu'il en fût autrement, la correction d'attitudes si invétérées étant à l'évidence une entreprise de longue haleine.
Mais on a vu, et l'on verra aux annexes de façon plus détaillée, que le Médiateur n'était resté inactif devant aucun des problèmes que pose l'information des administrés, les lenteurs imputables à l'Administration, aux juridictions, au Gouvernement même, le formalisme, la passivité, l'irrégularité sous toutes ses formes et même qu'il avait, en ces divers domaines, remporté des succès d'ampleur variable. On peut dire en somme que le Médiateur a maintenant sous les yeux le répertoire à peu près complet des défauts de notre Administration et que la connaissance de plus en plus nette qu'il en a acquise lui permet de les mieux combattre, en tout cas de les déceler à coup sûr.
L'Administration toutefois n'a pas que des défauts : c'est au contraire son esprit de libéralité, sa bienveillance, qui ont permis, comme on l'a vu ou le verra, de régler favorablement un nombre appréciable de litiges, quelquefois même en allant au-delà de ce que le réclamant demandait. Il est arrivé que le réclamant obtienne une autre satisfaction que celle qu'il avait en vue et même que l'Administration soit bien mal récompensée de ses efforts (réclamant refusant finalement l'emploi qui lui avait été trouvé avec beaucoup de difficultés ... ).
En outre, elle n'est pas seule à en avoir ; dans bien des cas, c'est le comportement de l'administré lui-même qui est à critiquer et le conflit qu'il soumet au Médiateur apparaît à l'analyse relever de sa propre responsabilité.
Ainsi, même en matière d'information, s'il est constant que l'Administration a tendance à retenir par-devers elle des renseignements ou des documents qu'elle aurait le devoir de diffuser, il faut bien constater que les administrés manifestent en ce domaine une passivité certaine, notamment lorsqu'une négligence, impossible à excuser, les a conduits à se laisser forclore.
Chose plus grave, la notion même de service public semble étrangère à certains réclamants. Ils ne comprennent pas que l'accomplissement d'une " mission de service public " puisse parfois aller à l'encontre de tel ou tel intérêt particulier (méconnaissance par un réclamant des objectifs économiques et sociaux du service publie de l'Emploi, par exemple).
On constate enfin chez l'administré une tendance nette à se décharger sur la collectivité de responsabilités qui devraient lui demeurer personnelles.
Aussi, tout en s'efforçant - ce qui est et demeure l'essentiel de sa mission - d'amener l'Administration à se corriger de ses défauts, le Médiateur n'oublie pas que les administrés ne sont pas toujours sans reproche, qu'ils ont des droits, mais qu'ils peuvent méconnaître des devoirs, bref, qu'il leur doit une protection vigilante, soutenue, passionnée parfois - jamais aveugle.
A mesure que les années passent, l'action du Médiateur s'élargit et s'approfondit à la fois.
L'augmentation du volume des affaires ne laisse pas de poser quelques problèmes d'effectifs et de structure, dont il a été fait mention dans l'introduction. Mais l'extension de l'audience du Médiateur a aussi cette conséquence que les administrés ont de plus en plus tendance à s'adresser à lui sans avoir accompli, auprès de l'Administration avec laquelle ils se disent en litige, les " démarches nécessaires " prévues à l'article 7 de la loi du 3 janvier 1973.
Il en résulte un nombre excessif de réclamations en état " d'irrecevabilité provisoire ", et de plus souvent inutiles puisque, lorsque l'intéressé aura accompli les démarches nécessaires ou bien l'Administration concernée lui donnera satisfaction, ou bien il sera obligé de renouveler son appel au Médiateur.
L'accomplissement de démarches préalables est une condition de bon sens mise par le législateur à la saisine du Médiateur : il est indispensable qu'elle soit mieux respectée.
En s'approfondissant, l'action du Médiateur atteint aux vrais obstacles.
Il a été constaté que le plus souvent les injustices dont se plaignent les réclamants proviennent d'une mauvaise conception et surtout d'une inadaptation des textes, législatifs ou réglementaires, qui leur sont appliqués. A une époque d'évolution accélérée, les textes vieillissent si vite que l'idée vient immédiatement à l'esprit d'un " appareil " qui permettrait, dans le cadre des institutions actuelles, leur adaptation continue...
Devant de tels cas de distorsion entre le droit et le réel, l'Administration peut, on l'a dit plus haut, faire preuve de libéralisme. Mais il arrive aussi, et malheureusement trop souvent, qu'elle s'en tienne au texte tel qu'il est - c'est-à-dire à quelque chose qui peut déjà s'être fort éloigné de la vie - manifestant alors un formalisme, un rigorisme, un légalisme que le présent Rapport se doit de dénoncer comme ses devanciers.
Le Médiateur est amené dans ces conditions à lancer un pressant appel à notre Administration : il lui demande, même dans les cas où sa position juridique est inattaquable, où elle a sans conteste " raison ", mais où la règle qu'elle applique peut paraître mal adaptée, d'examiner l'affaire dans un très large esprit de conciliation.
Cette générosité pourrait n'être que provisoire et ne ferait pour ainsi dire qu'anticiper l'" avenir de la règle " si les réformes que le Médiateur propose voyaient le jour plus rapidement.
Il faut insister de nouveau sur le caractère réaliste de ses propositions de réforme, toutes issues de situations concrètes, toutes appuyées sur un grand nombre de réclamations convergentes : on en déduira qu'il y aurait le plus grand intérêt à les faire examiner rapidement, suivant une sorte de " procédure d'urgence ".
Le Médiateur estime que si, à partir d'une réclamation, se révèle une injustice qui est le fruit d'un texte défectueux, alors, la première et la plus naturelle des choses à faire est de modifier ce texte sans tarder.
Le Médiateur est au point de départ de ce " circuit de retour " - d'une espèce inconnue jusqu'à 1973 dans notre organisation institutionnelle - retour du fait sur le droit, de l'effet de la règle sur la règle elle-même.
Encore conviendrait-il que les " messages " qu'il lance reçoivent au plus tôt leur traduction concrète.