12 heures 45: Buffet.
Rapport spécial remis le 24 mai 1984 au Chef de l'Etat par M. R. Fabre, Médiateur de la République
Agité par les difficultés économiques, secoué par les conflits idéologiques, les guerres de religion, le monde entier, à de rares exceptions près, vit dans la tourmente.
Parmi ces exceptions, la France.
En paix - mis à part les dramatiques événements d'Indochine et d'Algérie et quelques tragiques engagements récents- depuis près de quarante ans. Sans disette ni épidémies. Bénéficiant, dans l'ensemble, malgré des inégalités à réduire, d'un niveau de vie élevé.
De ces privilèges, les Français ne semblent pas conscients.
Réalisent-ils davantage que, ces problèmes de survie étant écartés, ils jouissent non seulement de la paix et de l'abondance, mais encore d'une large liberté ? Celle qu'apporte, malgré ses multiples imperfections, le système démocratique.
Non. Car, en fonction du réflexe du verre à demi vide, nos compatriotes ont perdu de vue les dangers auxquels ils échappent quotidiennement, et que connaissent tant d'autres peuples. Les médias ne nous épargnent pourtant pas les images d'horreur. Mais nous les localisons dans un " ailleurs " qui nous paraît lointain, et dont nous nous croyons protégés.
La guerre, c'est du côté de Bagdad. La guerre civile, c'est à Beyrouth ou au Salvador. Les tortures, au Chili ou au Cambodge. La faim, au Sahel ou au Bengladesh. L'occupation, en Afghanistan. Les goulags, en Sibérie...
Certes, nous avons nos enlèvements, nos attaques à main armée, nos délinquants, nos drogués.
Mais ces " bavures ", contenues dans des limites supportables pour ceux qui ne sont pas directement concernés, cette fausse sécurité nous incitent à penser surtout à préserver notre confort matériel.
Les risques nucléaires, on les craint ou on les accepte avec fatalisme ou on les assume. Mais les risques de la vie de tous les jours paraissent de plus en plus inacceptables. Emploi garanti, niveau de vie en croissance, protection contre la maladie, contre la vieillesse, promotion sociale, réduction du temps de travail, loisirs et culture, voilà, c'est certain, des objectifs qui méritent d'être défendus. On comprend le désir légitime de chacun d'échapper au chômage, de bénéficier d'avantages sociaux, d'élever sa famille dans les meilleures conditions. Mais jusqu'où peut aller la générosité publique dans la redistribution des gains de productivité et des richesses acquises, quand monte l'âpre concurrence mondiale et que sont dépassés nos moyens de production et nos prix de revient ?
Ignorant superbement la dégradation de notre situation économique, tant au regard des pays à technologie plus avancée qu'au regard des pays à bas salaires, nous continuons à réclamer de l'Etat omniprésent et protecteur davantage encore de crédits, de subventions, d'aides, d'allocations ou de primes; et, à la moindre stagnation de notre pouvoir d'achat, nous mobilisons; corporation par corporation, syndicat par syndicat, nos forces les plus vives au profit d'une contestation quasi permanente.
" Moins d'impôts, moins d'efforts et plus d'avantages ! " C'est caricatural, mais c'est vrai.
Maintenue trop longtemps dans l'illusion de la crise passagère, notre société admet avec peine la remise en cause de ses privilèges, parfois baptisés " droits acquis ", et perd de vue l'intérêt général, au profit d'une lutte corporative, égoïste, aveugle.
Les syndicats ont tendance à se mobiliser sur les thèmes de l'immobilisme économique: maintenir le passé plutôt qu'avancer hardiment vers un avenir technologique qui révolutionnera toutes nos traditions et habitudes.
Les partis politiques vivent trop dans la hantise des sondages et des échéances électorales. Leurs responsables, paralysés par la perspective de leur possible échec, sont tentés par la facilité démagogique et oublient ainsi le rôle d'éducateurs politiques que la Constitution leur a confié.
Ce vent, de pessimisme, de défaitisme amer, de désillusions remâchées ou de revanches à prendre ne peut être porteur de la moindre espérance pour notre jeunesse.
Cette jeunesse n'a pas- heureusement !- connu la guerre. Ecartons l'idée absurde de la nécessité d'une autre guerre pour la " motiver ". Elle est prête à l'enthousiasme si l'on sait lui donner des responsabilités que, trop souvent, on lui refuse; si l'on sait l'arracher au dégoût, à l'indifférence; si on l'invite à autre chose qu'une carrière où la promotion et le gain dans une société aseptisée et sans risques tiennent lieu de foi et d'espérance.
Accéder à la nouvelle citoyenneté, c'est d'abord donner à chacun, dès sa prime jeunesse, le sens des responsabilités, puis les responsabilités elles-mêmes.
C'est apprendre à chacun ses droits, mais aussi ses devoirs.
C'est lui rappeler que l'épanouissement de l'individu exige l'acceptation de la vie en société collective au lieu du frileux repli et du " chacun pour soi ".
C'est lui donner les moyens de connaître nos institutions, nos rouages politiques, notre système démocratique, pour lui permettre d'abord de s'inscrire sur les listes électorales (plus de quatre millions de Français s'en abstiennent); ensuite, de choisir lucidement son bulletin de vote; enfin, de s'engager les yeux ouverts dans l'action syndicale ou politique.
C'est lui fournir les éléments de connaissance de l'économie pour réussir sa vie professionnelle.
C'est le tenir informé des évolutions technologiques si rapides que connaît un monde où le règne de l'informatique remet en cause bien des données de notre éducation et de nos actes quotidiens.
C'est lui faire gagner et apprécier les avantages qui s'attachent à une société démocratique, et qui se nomment liberté, égalité des chances, solidarité.
Dans le même temps, où alimenté par l'insécurité, la violence et la déception, se développe un profond courant de pessimisme et de découragement, commencent à se manifester les symptômes d'un possible redressement.
On n'en relève encore que les aspects d'apparence négative: la tentation de révolte, le recours aux solutions extrêmes.
Il faudrait peu de chose pour que le désir d'évolution, toujours latent chez une jeunesse saine par définition, renverse la tendance au profit d'un élan régénérateur.
Sans doute, dans les décennies où s'impose le bond inimaginable des technologies informatiques, spatiales et biologiques, faut-il d'abord y adapter nos " actifs " pour ne pas perdre pied dans la sévère compétition internationale.
Sans doute faut-il lancer les jeunes générations à la conquête de la maîtrise des sciences nouvelles.
Mais pas au prix de l'abandon du " sens de la vie ", pas en y perdant notre âme.
L'objectif développement économique et scientifique n'est pas plus primordial que l'objectif épanouissement de l'individu dans une société solidaire. Ce qui exige que le " grand dessein " de notre nation soit autant spiritualiste que matérialiste.
Laissant à d'autres, bien plus qualifiés, le soin de nous forger de futurs techniciens et chercheurs pouvant rivaliser dans le monde avec les meilleurs, j'en appelle à ceux que leur mandat ou leur fonction ont situés au plus haut niveau des responsabilités pour que, dans un effort parallèle nous assurions la formation de vrais citoyens, conscients de leurs devoirs tout autant que de leurs droits.
Il ne s'agit pas, comme cela existe, hélas ! dans trop de pays, de fanatiser notre jeunesse, de l'embrigader par une propagande religieuse ou idéologique.
Au pays de Descartes, on peut faire appel à la raison autant qu'aux sentiments.
C'est dans cet esprit qu'ayant rencontré des personnalités issues de tous les horizons, qui partagent ces vues et cette espérance, j'ai constitué un groupe de travail, puis des sous-groupes, qui ont beaucoup réfléchi et discuté; j'ai sollicité les avis, le concours de certaines autres, particulièrement qualifiées. Et la synthèse de ces études fait l'objet de ce " Rapport spécial Médiateur ".
Œuvre largement collective, donc, mais dont j'assume la responsabilité, estimant - ainsi que je l'ai exprimé à maintes reprises - que le Médiateur de la République peut et doit, dans le cadre du pouvoir de promoteur de réformes que lui a confié le législateur, lancer un appel en faveur d'un changement des mentalités; souhaiter que, dans le nécessaire équilibre à maintenir entre les citoyens et leur Etat, chacun assume pleinement ses responsabilités.
Le Français de demain ne doit plus être un " assujetti ", ni devenir un simple matricule. Il doit être pleinement citoyen.
Car être citoyen, c'est refuser de subir passivement les conséquences négatives d'une évolution trop rapide de notre mode de vie, en maintenant dans notre société les valeurs fondamentales de notre civilisation.
Ce rapport spécial comporte trois parties:
L'initiation à la vie sociale, économique et institutionnelle (nous n'emploierons parfois l'expression " instruction civique élargie " que par commodité) implique la durée: commencée dès le premier âge, à l'école, elle doit se poursuivre toute la vie, en formation " continuée ", et utiliser, largement, en sus des moyens classiques, le pouvoir des médias.
C'est pourquoi nous examinerons successivement l'éducation, la formation continuée, la communication.
Avec, pour chaque chapitre, le constat, les objectifs et les moyens proposés.
CHAPITRE Ier
Education
L'éveil de la personnalité intervient, tant dans le milieu familial qu'à l'école, dès le plus jeune âge. Dès l'école maternelle, dès le berceau disent certains, il convient d'éveiller l'esprit de l'enfant au monde extérieur.
Chacune des relations entre les parents, les maîtres et les enfants concourt à l'éducation globale du futur citoyen. Dès lors peut être préparé le terrain apte à faire germer ultérieurement l'esprit civique, qui est le sens des responsabilités et des devoirs.
Jusqu'à une époque récente, l'instruction civique, volet de notre instruction publique répondait à la mission impartie par le législateur de 1887. L'histoire est là pour en témoigner. Mais, avec l'évolution des moeurs et les crises qui ont secoué la société au cours de ces dernières années, elle a progressivement perdu de son audience, de sa crédibilité, pour apparaître en définitive dépassée, inadaptée aux exigences du temps présent.
1- Le constat.
Nous connaissons actuellement - et c'est vrai aussi au-delà de nos frontières - une crise des valeurs civiques et morales, qui se manifeste tant chez l'enfant et l'adolescent que chez l'adulte par un développement de l'agressivité, de la violence, de la lâcheté devant cette violence, bref par l'égoïsme. A quoi s'ajoutent le laxisme dont font trop souvent preuve parents et maîtres, et l'intolérance dont l'exemple vient parfois de haut. On peut trouver dans les structures et les programmes de l'enseignement moderne certaines causes de cette désaffectation des valeurs morales traditionnelles et responsabilité, de solidarité, de fraternité.
La suppression de nombreuses classes dans les bourgades rurales, corollaire de l'entassement dans des cités déshumanisées, a contribué à détruire l'environnement naturel, humain du village. Cette destructuration de l'enseignement a opéré une véritable strangulation de la fonction pédagogique au niveau de l'éducation civique. Même figurant encore dans les programmes, celle-ci a été abandonnée ou négligée dans quantité d'établissements scolaires.
Mais il serait inéquitable de mettre en cause le seul système éducatif. L'indifférence ou le refus exprimés par l'individu à l'égard de certaines valeurs expliquent beaucoup de comportements jugés critiquables. Aussi, de nos jours, l'autorité n'est-elle plus acceptée comme auparavant. Certes, si les jeunes en éprouvent inconsciemment le besoin et ne la contestent pas en tant que valeur intrinsèque, en revanche ils la rejettent dans son expression et dans les procédures à travers lesquelles elle s'exerce.
Il est intéressant à ce propos d'analyser l'évolution de cette attitude. Vers les années 1900, on a vécu dans la crainte de l'autorité; à partir de 1950, ce sentiment s'est mué en contestation systématique pour aboutir à l'explosion de 1968. Et, fait paradoxal, de globale et monolithique durant une brève période, la contestation s'est " délitée ", pour devenir anarchique, phénomène que nous connaissons présentement.
Mais d'autres explications peuvent encore être trouvées, telles les relations s'établissant entre les partenaires politiques, sociaux et familiaux, le caractère manichéen de l'affrontement des classes et des responsables politiques, les disparités socio-économiques d'une société qui s'accroche vaille que vaille à la notion de consommation, l'incompréhension des adultes vis-à-vis des jeunes. Tout cela conduit à circonscrire la jeunesse dans un monde différent, dans un " monde kafkaïen ".
De même en ce qui concerne l'autorité, dans toute l'acception du terme, on peut se poser la question de la dualité existant - et très ressentie par les jeunes - entre l'autorité telle que la conçoivent les parents au sein de la famille et celle exprimée par l'enseignant en milieu scolaire, dont l'impact sur la jeunesse n'est forcément pas négligeable.
L'éducation est étroitement liée au vecteur communication. Or l'information que reçoivent les enfants est très différente de celle d'antan; limitée alors à la lecture, la classe, le milieu familial où il existait des relais: livres, professeurs, parents, grands-parents. De nos jours, les jeunes disposent de moyens directs de perception grâce à l'image et au son et il n'y a plus d'intermédiaires obligés entre eux et le monde extérieur. Cela contribue à transformer radicalement les relations parents- enfants; d'où des réactions parfois brutales à l'origine de divergences significatives entre ce que l'enfant interprète par l'image et ce qu'en pensent les parents. Ce même hiatus se retrouve parfois entre éducateurs et élèves, d'où le divorce intellectuel et affectif entre les partenaires concernés qui pourrait expliquer en partie notre société " éclatée " d'aujourd'hui.
Mais il y a plus. L'instantanéité de l'information, les moyens modernes d'écoute et d'expression, les procédures de traitement de données - même élémentaires (informatique, robotisation, bureautique, etc.) nécessaires maintenant à la vie quotidienne sont autant de données contribuant à rendre délicate la compréhension réciproque entre adultes et jeunes. Les premiers seraient rebelles à l'innovation parce que, parfois, leur culture se révèle fragmentaire; les seconds, assoiffés de modernisme, parlent un langage hermétique, rompant ainsi toute possibilité de communication.
Par ailleurs, l'information dispensée quotidiennement en tant qu'expression des idées et traduction des faits, ne revêt pas toujours les critères d'objectivité requis et de respect des valeurs. Et cela n'est pas sans influer sur le psychisme et les mentalités des jeunes gens, exposés durant des heures à l'action combinée d'images matraquage.
Une évidence s'impose: bien des parents ne sont plus conscients du rôle qu'ils ont à jouer dans l'éducation de leurs enfants, allant parfois jusqu'à une certaine démission. Ils en sont restés au stade de l'enseignement " primaire ", ne se rendant pas compte de l'évolution signalée plus haut. Par ailleurs, il est affligeant de relever, lors des réunions de conseils de classe, de conseils d'établissement dans les établissements scolaires, l'impossibilité pour les Jeunes de faire passer leur message (que les adultes ne veulent parfois pas écouter). Alors, pour se faire comprendre et s'exprimer, il ne leur reste plus comme ressource utile qu'à se livrer à des excentricités, à des provocations, voire à des gestes désespérés pour attirer l'attention des adultes.
Ainsi nous trouvons-nous confrontés à des cultures parallèles selon que l'on appartient à une génération ou à une autre; chacun ayant son langage propre, et posant le problème de l'adaptation de la génération ancienne à la génération plus jeune, celle-ci, davantage orientée vers l'audiovisuel et disposant d'un autre support pour acquérir les connaissances.
Certes, ces générations ont les mêmes visées profondes, mais s'expriment avec des langages différents, qui ne se rejoignent pas; comportement qui s'explique par le fossé entre la génération des adultes marquée par la guerre et celle des jeunes rejetant ce qu'ils n'ont pas vécu, d'où la difficulté pour ces derniers de s'adapter à la vie de la cité et leur désaffection à l'égard de la vie publique.
Ces quelques réflexions aboutissent à un constat global de carence: nous ne possédons pas actuellement en France un réel projet de société, lié aux valeurs de civisme et de morale, en mesure de remédier à la communauté " éclatée " que nous subissons sans réagir.
2- Les objectifs.
La mise en oeuvre d'une efficace initiation à la vie sociale, économique et institutionnelle (instruction civique élargie et modernisée) ne peut se situer que dans le cadre d'une éducation globale de l'être humain, et non se réduire à la vision étriquée du simple exercice des droits et de l'observance des obligations.
Avant même la fixation des objectifs de base, deux préalables sont à respecter, sans lesquels aucune éducation valable ne peut se concevoir:
- dans les relations humaines, substituer le débat au combat;
- utiliser un langage et des méthodes accessibles à tous, quel que soit le milieu d'origine.
Tout système d'éducation qui a pour objet d'aider l'individu à mieux comprendre la société où il évolue et à s'y insérer ne doit pas lui en cacher les difficultés et les tares, mais doit l'inciter à la civilité et à la convivialité. La courtoisie, la sympathie témoignée donnent une tonalité plus agréable à la vie courante. La tolérance commence au niveau du dialogue engagé. A la curiosité naturelle des jeunes, les adultes (parents et enseignants) doivent répondre dans un langage simple épuré d'un excès de termes techniques et ésotériques. Trop de manuels - en particulier scientifiques - sont d'un hermétisme répulsif pour des élèves déjà peu enclins à " subir " l'information.
Ces préalables observés, quelques objectifs de base sont à retenir:
- le sentiment d'appartenance à une communauté nationale pluriculturelle;
- le respect de la personne et l'acceptation délibérée de la vie en collectivité;
- le développement du sens de la responsabilité.
C'est tout au long de la formation scolaire que doit être favorisé l'épanouissement de la personnalité, et tout particulièrement dans " l'âge adulte de l'enfance " que recouvre la période de sept à dix ans.
Dès l'enseignement du premier degré, les jeunes doivent être entraînés à faire des choix et à s'y tenir; il faut donc les amener à découvrir, tant en classe que dans leurs loisirs, les vraies raisons guidant de tels choix; à faire l'apprentissage du renoncement à toutes les facilités qui, sous prétexte de bonne entente et de respect mutuel, incitent à ne pas prendre position, cherchant la conciliation comme le bien suprême aux dépens de la justice et de la vérité.
La reconnaissance des autres et l'initiation au social doivent faire appel à des préceptes simples: ainsi, dans les petites classes, est-il souhaitable de développer un cours d'histoire de la France insistant sur les aspects constructifs, montrant aussi la nécessité de la solidarité des nations entre elles en soulignant en particulier la dimension européenne. A cette occasion, les jeunes étendront au domaine de l'histoire et de la géopolitique la découverte de la notion d'universel qu'ils sont en train de faire dans les autres disciplines. Peut-on leur laisser méconnaître les drames du tiers et du quart monde, qui en appellent à notre solidarité ? On saisira de même le réflexe de l'autodéfense que les jeunes pratiquent spontanément dans leurs jeux pour leur faire découvrir ce que sont la communication et le respect d'autrui et les raisons de l'une et de l'autre.
On pourrait imaginer, dans les activités d'éveil, l'évocation des thèmes de la paix, du respect et de la défense du bien commun, montrant l'interpénétration de ces notions. Si, à ce niveau d'âge, la notion de bien commun est bien intégrée, il y a de fortes chances pour qu'au moment de l'adolescence et à l'âge adulte elle devienne une réalité civique et sociale indispensable pour accepter le pourquoi et le comment de la vie, qui sont la base de toute communauté humaine.
Dans l'enseignement du second degré, il faut promouvoir un enseignement de l'histoire et de la géographie présenté de manière objective, un enseignement de géopolitique associé à l'acquisition d'une véritable connaissance, et des éléments de droit international incluant la vie des divers organismes internationaux. Pour être efficace, cette connaissance pourrait être matière d'examen facultatif avec bonifications. Les divers enseignements touchant au droit des affaires, à la connaissance des lois sociales, des institutions devraient être prolongés dans les universités, et non réservés à ceux qui poursuivent leurs études dans les facultés de droit et de sciences économiques.
L'initiation à la vie sociale, économique et institutionnelle, vise également les adultes, plus généralement dans leurs relations avec les enfants et leur attitude vis-à-vis d'eux-mêmes. En effet, s'il est tout à fait normal que les jeunes s'expriment, il l'est davantage que les adultes apprennent à les écouter; d'où ce principe de savoir écouter à quelque niveau de la hiérarchie sociale que l'on se situe; cela pour transformer l'autorité traditionnelle en autorité expliquée, au lieu et place de l'autorité de commande; autorité expliquée, laquelle avant d'agir ne craint pas d'avoir recours aux médiations préventives permettant le " faire-valoir " des arguments indispensable à tout dialogue positif.
Selon cette démarche, on admettra aisément que l'éducateur (parents, enseignants, cadres) censé disposer du savoir, puisse, après avoir écouté, expliquer au jeune qui est demandeur. Dans ces conditions, il doit se révéler capable d'être à la fois animateur et écouteur. Une information commune commentée par l'éducateur et par l'éduqué conduira forcément à une plus grande compétence pour discuter. Et le débat pourra se prolonger au sein de la famille ou dans tout autre milieu, de sorte que l'enseignant devienne l'enseigné, et vice versa, chacun y trouvant son compte par un enrichissement de la personnalité et l'instauration d'une confiance réciproque.
3- Propositions
- l'enseignement " civique " devrait d'abord reprendre les matières de l'instruction civique traditionnelle, mais en faisant une place aussi large que possible à des notions de droit (civil, administratif, constitutionnel) ainsi qu'au mécanisme concret des institutions démocratiques (élections, conséquences de la décentralisation, etc.);
- à cet apprentissage du citoyen s'ajouterait un apprentissage du " citoyen dans l'économie ". D'où la nécessité d'étendre l'éducation civique à des domaines tels que la gestion économique et financière, la comptabilité, le crédit, l'export - import, etc., sans oublier la planification nationale, les systèmes de protection sociale et, surtout, l'information, indispensable atout de l'homme moderne;
- ces enseignements réserveraient naturellement une large place à l'utilisation des moyens audiovisuels. Ils devraient aussi- et cela paraît essentiel-comporter des " travaux pratiques de la vie de tous les jours " qui mettraient les élèves au contact de tel ou tel aspect de la vie politique, administrative, économique et sociale, leur permettant ainsi de prendre conscience des problèmes qu'ils auront à affronter dans leur vie d'adulte. Il paraît indispensable que les enseignants de leur côté - pour ce qui concerne les non-initiés - reçoivent une formation au moins élémentaire dans cette discipline et les sciences de communication, afin que la relation enseignants- élèves s'instaure sans difficultés;
- l'éducation ainsi conçue ferait d'abord appel, naturellement, aux membres du corps enseignant. Mais la question se pose de savoir si sa spécificité nouvelle n'exigerait pas la création d'un corps spécialisé, composé par exemple des nombreux professeurs de lettres, de psychologie, d'histoire, etc., qui, pour des raisons diverses, se trouveraient disponibles. Ou si, du moins dans un premier temps, ces professeurs, dans le cadre d'une nécessaire coordination, ne pourraient être chargés de cet enseignement complémentaire;
- il est recommandé de développer la formation continue des enseignants pour qu'ils acquièrent la compétence requise et actualisée dans les domaines de l'économie, du social et des finances publiques. Cette formation " continuée " doit se concrétiser par un recyclage permanent. La même action doit s'exercer auprès de la population adulte avec des programmes appropriés de la télévision et de la radio; restant entendu que spectateurs et auditeurs se sentent directement concernés, et aient donc été sensibilisés au préalable;
- le système éducatif dans son ensemble (plus spécialement les ler et 2ème cycles scolaires) doit s'ouvrir au monde socioprofessionnel et économique, ce qui pourrait se matérialiser par le détachement d'économistes, d'ingénieurs, de juristes, de sociologues, de politologues, de chefs d'entreprise et de responsables politiques et syndicaux dans les établissements. Ces acteurs de la vie économique seraient appelés à informer les membres du corps enseignant sur les problèmes d'actualité, afin de les commenter ultérieurement aux élèves. Cette même démarche est à adopter pour les cadres des secteurs public et privé ainsi que pour les responsables syndicaux;
- une structure légère pourrait être instituée au niveau des différents établissements d'enseignement, afin de permettre aux jeunes de rencontrer ces personnes d'expérience et de " vivre ensemble " cette nouvelle forme d'enseignement;
- à titre expérimental, quelques établissements scolaires pourraient être retenus comme " pilotes ", un enseignant spécialisé jouant le rôle d'animateur- coordonnateur avec la participation de représentants de diverses professions et administrations concernées par cette initiation;
- la généralisation dans les établissements scolaires de débats professeurs et élèves serait souhaitable, discussions devant porter sur des sujets d'actualité, d'ordre politique, social, économique, et ce à partir d'une information strictement objective et contradictoire;
- les projets d'établissement sont de nature à créer une plus grande concertation entre parents, enseignants et élèves; c'est là l'occasion d'apprendre aux uns et aux autres à se responsabiliser et à s'assumer, adultes comme jeunes.
Il serait souhaitable que l'ensemble des propositions énoncées dans le présent rapport soit pris en compte dans le projet pédagogique que chaque établissement scolaire est appelé à élaborer. Des expériences pilotes permettraient d'en apprécier la fiabilité et 1 efficacité.
Enfin, l'organisation même de cet enseignement - sa durée, ses programmes, sa sanction - pose des problèmes qu'il serait présomptueux de vouloir résoudre d'emblée. Mais il semble qu'il devrait se développer jusqu'à la majorité légale de l'élève. Quant à sa sanction, elle sera évidemment différente suivant que l'on fera ou non de l'éducation civique une discipline autonome. Dans la négative on pourrait penser, par exemple, à une bonification de points aux examens.
A ces propositions doivent s'ajouter des mesures à caractère ponctuel :
- le recours aux médias représente une source extraordinaire de possibilités; les moyens existent, seule l'imagination créative manque pour mettre ceux-ci à la disposition du plus grand nombre en recherchant - des émissions en mesure de traiter (avec un souci pédagogique sous-jacent) les problèmes répondant aux préoccupations du citoyen. A titre d'exemple, pourquoi ne pas adopter le principe d'une émission hebdomadaire de télévision de trente minutes pour les élèves du niveau des CM 1 et CM 2, suivie d'un débat d'une même durée avec la participation des jeunes d'âge scolaire ? Emission qui serait reprise le lendemain en classe (vidéo), les élèves établissant un compte rendu au professeur qui leur donnerait des explications complémentaires;
- par ailleurs, un développement des moyens audiovisuels en matière d'orientation serait de nature à faciliter chez les jeunes un choix plus réfléchi de carrière;
- de manière à combler le vide consécutif à la mise en veilleuse ou fermeture de nombreuses écoles de village, il serait judicieux d'équiper les localités intéressées de moyens modernes de communication (tels que Minitel, câblages ... ) reliés à des banques de données afin de recréer des pôles culturels si nécessaires à nos populations rurales ;
- pour une meilleure connaissance des rouages de l'Etat et pour son image de marque, les programmes scolaires devraient comporter l'analyse des structures des ministères afin d'illustrer les relations s'établissant entre les départements ministériels, les grands services publics et le citoyen ;
- les métiers, la presse en général, les grandes administrations de l'Etat et le secteur privé doivent participer à cette action de revalorisation des valeurs civiques. Et cela sans complexes ni hypocrisie. A ce sujet, il conviendrait de mettre plus fréquemment l'accent sur la vie et les problèmes de la cité, plutôt que de se complaire dans des exemples d'individualités érigées en idoles.
Enfin, il est évident que doit se développer la lutte contre l'analphabétisme : toutes les administrations sont concernées et doivent y participer en appliquant strictement les mesures prises par le conseil des ministres du 11 janvier 1984 dans ce domaine.
Quelques exemples d'acquisition pratique
Jeux simulés
Les élèves simulent une réunion du conseil municipal, un débat à l'Assemblée nationale, une négociation salariale entre patrons et syndicats, etc. Les questions traitées peuvent être des plus variées : nationalisation, décentralisation, nuisances, nucléaire, etc.
Une revue de presse écrite peut permettre des débats sur les grandes questions d'actualité.
Jeux télévisés
Les démocraties ne savent guère se servir de l'excellent outil de formation que peut être la télévision. Celle-ci sert principalement à la distraction. Un grand effort d'imagination devrait permettre d'allier l'instruction et la distraction.
Multiplication des relais de formation civique
- maires et instructeurs pour la vie municipale ;
- patrons pour la vie des entreprises ;
- parents invités à emmener leurs enfants dans les bureaux de vote ;
- services publics ;
- développement de l'action du Centre d'information civique, de la Ligue des Droits de l'homme, de la Ligue de l'enseignement, etc. ;
- encouragement au scoutisme axé sur le " service " et la responsabilisation.
Création de stimulants
Voyages gratuits à Paris et chefs-lieux de département et de région offerts aux lauréats pour visiter les rouages de l'Etat, d'organisations intergouvernementales.
Approche pluridisciplinaire
Histoire, économie, géographie, français, sciences physiques, documentation et éducation physique devraient concourir étroitement, dans un vaste effort d'imagination, à rendre l'instruction civique vivante et concrète.
Toutes ces méthodes, et d'autres encore, peuvent être mises en oeuvre pour donner à nouveau une âme à l'indispensable initiation civique des Français. Mais elles ne seront pratiquées sur grande échelle, comme il convient, que s'il existe un organisme autonome de recherche, de réflexion du type d'une fondation, pour assurer la rénovation, l'adaptation et la permanence de la formation civique.
Les instructions ministérielles de 1887 ont défini les bases et arrêté les grands principes d'une instruction civique que Jules Ferry voulait voir dispenser par un solide corps d'enseignants, formateurs admirables pour lesquels le civisme n'était pas un vain mot. Ces maîtres d'école ont servi le pays avec une ferveur quasi sacerdotale : les sacrifices consentis par la nation quelques années plus tard en sont l'illustration la plus probante.
Les événements des dernières décennies, l'accélération du monde, la transformation des mentalités avec une remise en cause sous-jacente de certaines valeurs traditionnelles ont contribué inévitablement au divorce entre l'esprit même de l'instruction civique de la III' République et le comportement des gens en cette fin du XXème siècle.
Prôner quelques idées concrètes en vue d'actualiser et d'élargir cette instruction au social, à l'économie et aux institutions n'est pas une démarche " rétro " d'esprits nostalgiques, mais peut représenter une dynamique intéressante destinée à répondre aux préoccupations légitimes : d'une société tourmentée, voire en état de crise. Conforter l'individu dans la connaissance et l'expression de ses droits et le responsabiliser dans ses devoirs afin qu'il participe sans affrontement à la vie quotidienne, où chacun trouve sa place et y joue un rôle ; voilà les objectifs.
Mais ceux-ci ne seront intégralement atteints que dans la mesure où l'initiation à une éducation civique élargie sera poursuivie dans le cadre de la formation professionnelle des adultes et à travers l'information quotidiennement diffusée par les médias.
CHAPITRE II
La formation continue
L'éducation du citoyen n'est pas achevée à l'issue de la formation scolaire ou universitaire. Elle doit nécessairement se poursuivre dès l'entrée dans la vie professionnelle, familiale, et même dans la retraite.
A chaque instant, le citoyen doit lutter contre la tendance au repli sur soi, contre la tentation exagérée de sa défense catégorielle, et en faveur d'une communication et d'une solidarité accrues avec ses concitoyens.
D'où l'opportunité de parachever la contribution déjà apportée par le système éducatif par une formation " continuée " tout au long de la vie professionnelle.
1. Le constat.
Ce constat est sévère. On ne peut que relever (excepté le cas des militants politiques et syndicaux) la quasi absence de doctrine, d'action coordonnée en faveur de la formation civique, tout au long de la vie active, mis à part les périodes électorales, où l'on tombe dans un autre excès, celui de la " propagande ".
A part certaines grandes écoles, les instituts de formation, l'armée, il n'existe aucun programme bien défini qui intègre une part d'éducation civique dans ses objectifs. C'est vrai dans l'enseignement professionnel et technique, dans l'apprentissage par contrat dans les entreprises, dans la formation par alternance, dans une formation continue dans le cadre de l'éducation permanente.
Sans cesse sont revendiqués les " droits ", rarement sont évoquées les obligations qui découlent logiquement des avantages du système démocratique.
La participation à la vie de la cité, dans les groupes et associations qui l'animent, devrait pourtant favoriser la prise de conscience de la responsabilité de chacun.
Mais, trop souvent, à l'apprentissage de cette responsabilité est préféré le recours à " l'assistance ", sous ses diverses formes. Chaque difficulté rencontrée se traduit par un appel à l'aide de l'Etat, de plus en plus sollicité, ou de la collectivité locale, dont les moyens n'accompagnent pas suffisamment les nouveaux pouvoirs dont elle est dotée.
Ce refus de se prendre en charge développe l'égocentrisme, l'indifférence, et peut susciter déception et contestation stérile.
L'individu n'est pas seul en cause. Dans l'état actuel des systèmes qui nous régissent, il n'a pas reçu dans sa scolarité les moyens lui permettant d'entrer dans la " lutte pour la vie " avec le maximum de chances. " L'égalité des chances " reste un mythe. D'où la nécessité d'un rattrapage pour les adultes.
Et si, nos propositions en matière de formation civique scolaire étant retenues, il aborde mieux armé la vie active, il aura besoin pour assurer sa réussite professionnelle, avec les changements d'orientation, de spécialisation qui lui seront imposés, d'une formation " continuée " qui lui apportera le complément de connaissances économiques, sociale, politiques que commande la permanente et rapide évolution de notre société.
La formation professionnelle, la promotion sociale, ne doivent donc pas se limiter à la seule accumulation des connaissances, mais s'orienter vers l'acquisition d'un comportement de responsable.
Il est également regrettable que ne soient pas mieux et plus largement utilisées les ressources offertes par les moyens modernes de communication.
Notons enfin que les services publics, comme certaines grandes entreprises, en raison de la rigidité de leurs structures et de la trop grande spécialisation dans les emplois, ne prévoient pas suffisamment de " passerelles " pour les reconversions souhaitables, et ne favorisent pas toujours l'humanisation des rapports entre les citoyens.
2° Les objectifs.
Que sommes-nous en droit d'attendre de l'adolescent qui aura bénéficié de l'initiation à la vie sociale, économique et institutionnelle, telle que nous l'entendons, pour qu'il devienne un véritable citoyen ?
Qu'il réponde à un certain nombre de critères qui nous semblent définir le citoyen modèle :
- être conscient intellectuellement de l'ensemble des règles de conduite que lui ont apporté la famille, l'école et son expérience personnelle ;
- avoir un comportement fondé essentiellement sur la convivialité, avec la faculté de s'adapter sans agressivité aux circonstances parfois délicates de l'existence;
- connaître et reconnaître autrui, tout en s'assumant par le développement des connaissances et la recherche des responsabilités, à quelque niveau que l'on se situe;
- avoir la capacité de se donner une identité, c'est-à-dire apporter la preuve de sa personnalité dans l'action.
La volonté de se promouvoir étant une constante des peuples et des individus, de tels objectifs ne sont ni ambitieux, ni utopiques. Ces derniers pourraient se réaliser par la pratique d'une " formation continuée " basée sur quelques principes:
- la remise en cause permanente des règles d'une société en rapide évolution nécessite, outre une solide formation de base, une actualisation des connaissances du citoyen pour qu'il reste toujours " dans la course " et accepte mieux la mobilité de l'emploi;
- l'acquis civique doit donc être sans cesse complété, comme l'acquis professionnel, par des informations actualisées sur le droit du travail, le droit quotidien (budget familial, consommation, formalités administratives...), l'initiation à l'économie, à la vie des entreprises, aux charges sociales, à la santé, à la retraite, etc.
Bien entendu, ces diverses mesures ne devraient pas se limiter à ceux qui bénéficient de formation professionnelle ou de reconversion, mais, selon les moyens d'action diversifiés, toucher l'ensemble des actifs, ainsi que les foyers, les associations, les retraités...
3° Les propositions.
La formation " continuée " que nous proposons constitue un recyclage permanent qui diffère de la formation continue dans son application par un " rattrapage " éventuel, en particulier dans le cas de l'analphabétisme des adultes et celui des représentants des communautés étrangères.
L'éducation civique qu'elle dispensera doit être adaptée aux données nouvelles enseignées (applications courantes de l'informatique, évolution de l'économie, des lois sociales, etc.) pour éviter un " rejet " de ces matières. IL convient donc d'adopter des formules attrayantes de présentation telles que films, vidéo, jeux, concours, etc. Ce type d'enseignement complémentaire devrait trouver sa place dans les stages de perfectionnement et les stages de reconversion.
Le contenu de cet enseignement porterait sur des sujets aussi divers que:
- les institutions, les notions de sécurité et de défense, etc.;
- la connaissance des partis politiques, des syndicats, de leurs statuts. Rôle des élus;
- la sécurité sociale: son mécanisme, ses formalités;
- la famille, les associations, les comportements sociaux;
- les pratiques de la vie courante: systèmes bancaires, épargne, fiscalité;
- la propriété, la location, les charges;
- la sécurité routière, le secourisme;
- les problèmes écologiques, l'environnement, l'hygiène;
- l'usage de la mini-informatique.
Les moyens à employer sont très diversifiés. Une base solide existe déjà: la formation professionnelle continue, dont les possibilités viennent d'être élargies par les dispositions de la loi n° 84-130 du 24 février 1984.
En moins de dix ans, 23 millions de personnes salariées ou demandeurs d'emploi ont suivi une action de formation continue représentant environ trois milliards d'heures de stages. L'enveloppe financière correspondante a atteint, pour la période considérée de 1972 à 1980, 100 milliards de francs courants. Par an, la durée maximale des stages par individu est passée de 190 heures à 221 heures (dont 55 heures financées par les entreprises en 1980).
Ces quelques chiffres - limités à la seule formation professionnelle que l'on aurait pu également extrapoler à d'autres secteurs - illustrent l'importance que revêt dans notre société la formation des adultes, qui concerne un peu plus du tiers de la population de notre pays et plus de la moitié de sa population active dans le temps. Or, l'éducation de l'homme - en tant que citoyen - pourrait y trouver tout naturellement sa place.
Dans l'hypothèse où les directives du ministre de l'éducation nationale en matière d'éducation civique seraient correctement appliquées, il paraîtrait souhaitable de les prolonger en les adaptant à l'enseignement dispensé au titre de la formation professionnelle qui s'adresse à un très large public et dispose de moyens financiers non négligeables. Pour ce faire, il conviendrait que les responsables de la formation professionnelle (Etat et entreprises) en soient pleinement conscients et concourent efficacement à l'action envisagée, c'est-à-dire à l'ouverture accrue sur la vie sociale, économique et institutionnelle, à partir d'un programme dont le contenu serait à intégrer à la formation professionnelle proprement dite.
Cette action se situerait dans le cadre des récentes lois sociales sous des formes à définir
- au niveau des instances publiques de la formation continue par le comité interministériel de la formation professionnelle et de la promotion sociale au plan national, par le comité régional de la formation professionnelle, de la promotion sociale et de l'emploi au niveau régional et par le comité départemental de la formation permanente, de la promotion sociale et de l'emploi au plan départemental;
- au niveau des organismes paritaires, par les commissions paritaires de l'emploi et du comité national interprofessionnel paritaire pour la formation et le perfectionnement professionnels;
- à la diligence des entreprises;
- dans le cadre de la formation;
par le budget de l'Etat grâce à une contribution spéciale; par les organismes informateurs (O. N. I. S. E. P., I. N. F. O. ou centre pour le développement de l'information sur la formation permanente, A. D. E. P. ou agence nationale pour le développement de l'éducation permanente) et par les organismes informateurs prescripteurs, tels que les centres d'information et d'orientation (C. I. O.), l'Agence nationale pour l'emploi (A. N. P. E.).
Indépendamment des entreprises qui dispensent une formation extrêmement importante, il y a lieu de signaler enfin, sur le marché de la formation, les organismes institutionnels dont l'action en matière d'ouverture à la vie sociale, économique et institutionnelle pourrait être déterminante.
Mais la formation professionnelle continue ne peut toucher l'ensemble de la population. Il existe d'autres moyens efficaces de donner aux citoyens le sens de leurs responsabilités.
La commune, première cellule de base après la famille, a un rôle essentiel à jouer.
C'est à son niveau - parfois au niveau du quartier - que, par une modification des rapports entre les élus locaux et la population, les habitants de la cité peuvent prendre conscience de leur responsabilité dans tous les domaines de la vie courante: protection des sites, des monuments, des jardins; propreté et hygiène; animation commerciale, culturelle; rencontres, débats, festivités... Maire et conseillers municipaux doivent être au contact de leurs administrés, leur donner accès à des commissions mixtes consultatives; créer parfois des conseils municipaux de jeunes; utiliser la radio locale comme moyen d'information et de liaison entre administrés et élus.
Ils doivent encourager la solidarité avec les demandeurs d'emploi, avec les étrangers pour étouffer tout germe de racisme.
Les entreprises doivent participer à cette formation par des journées " portes ouvertes "; par la participation des cadres et techniciens des diverses professions, aux côtés des enseignants et des fonctionnaires, à dès journées d'orientation de carrière, telles qu'en organisent les Rotary Club, les jeunes chambres économiques.
Les organismes à caractère social (foyers, crèches, centres sociaux) doivent s'ouvrir au contact des personnes âgées, des mères de famille, des personnes privées d'emploi, pour devenir des pôles de rencontres, d'information, de développement du sens social.
Les associations locales fondées sur le bénévolat peuvent être un intéressant relais pour la formation civique en développant l'esprit de solidarité (l'association Entraide et Amitié mène en Dordogne une action à citer en exemple).
Le centre d'information civique, qui dispose, avec ses correspondants, d'un maillage à travers l'ensemble du territoire, offre un élément intéressant d'incitation et de coordination de ces diverses initiatives.
L'armée consacre à l'instruction civique environ 3 p. 100 du temps réservé à la formation militaire générale des cadres, des appelés du contingent et des engagés. Cette action, déjà importante, pourrait être renforcée grâce au rôle primordial dévolu à la gendarmerie, dont la présence sur l'ensemble du territoire national constitue un relais irremplaçable.
Enfin, l'un des rôles essentiels appartient aux médias. C'est par la presse, la radio et surtout la télévision que peut s'effectuer l'initiation à la vie sociale, économique et institutionnelle avec sa prolongation tout au long de la vie.
C'est pourquoi la troisième partie de ce rapport est consacrée à la communication et à l'information.
CHAPITRE III
L'information
L'une des règles essentielles de la démocratie est le pluralisme des opinions. Ce qui implique une information à la fois objective et contradictoire: objective dans la présentation des faits, contradictoire dans les débats explicatifs, et éloignée de tout abus du pouvoir qui limiterait ou détournerait le choix du citoyen.
C'est dire l'importance que revêt ce secteur dans le domaine de la formation civique à tous les niveaux, c'est-à-dire scolaire et permanente.
L'évolution de notre société éclatée, réduisant l'influence du milieu familial et amenuisant le rôle des enseignants, privilégie les moyens nouveaux d'information et de formation, d'où la nécessité, pour la sauvegarde de la démocratie, d'une information pluraliste et de qualité. Cette information doit participer à nous éduquer à nous éclairer sur les problèmes qui agitent notre société, à amorcer l'indispensable dialogue entre gouvernants et gouvernés, tout en garantissant le plein exercice de la liberté d'apprendre et de penser.
Dans l'initiation à la vie sociale, économique et institutionnelle qui est notre objectif, la communication, avec ses différentes composantes, joue un rôle primordial. Elle appelle donc de notre part observations et propositions.
1° Le constat.
Dans le rapport annuel du Médiateur pour l'année 1981, une étude a été consacrée à l'information de l'administré. Elle relevait la surabondance des guides, des brochures, des notices en même temps que la difficulté pour le citoyen de se retrouver dans la confusion et la profusion d'indications trop souvent rédigées en termes abstraits ou techniques. Les abréviations, les sigles, les formules de style juridique ne facilitent pas sa vie. L'accueil aux guichets administratifs, malgré d'intéressantes expériences telle " A votre service ", est encore très insuffisant. Les heures d'ouverture restent encore trop souvent inadaptées aux disponibilités des usagers. Ces diverses observations restent largement d'actualité.
De même la presse écrite ne traite-t-elle le plus souvent les questions touchant à la formation du citoyen qu'à travers des faits divers, dont est prioritairement exploité l'aspect anecdotique, scandaleux ou tragique, au détriment de la leçon qui pourrait en être tirée en faveur d'un changement de mentalité ou de comportement ? On ne peut pas demander à tous les journaux des élans moralisateurs qui iraient - croient leurs responsables - à l'encontre du goût malsain d'un certain public pour l'étalage de la violence et de la passion. On ne peut pas leur demander davantage de supprimer toute photographie aguichante ou révoltante, mais de respecter une certaine éthique professionnelle laissant sa place à l'information éducative. Ce qui n'implique pas davantage, pour la presse d'opinion, de renoncer à ses options politiques. Le pluralisme, sur cette matière, est la meilleure garantie de la démocratie.
On mesure, en fonction de la place qu'occupent dans notre vie radio et télévision, combien l'information qui en émane revêt d'importance. Le rôle du journaliste est primordial. Son attitude! le ton qu'il emploie, son agressivité ou son aménité dans un débat peuvent remettre en cause l'objectivité à laquelle il est théoriquement tenu.
Quant à la nature des émissions, elle est souvent déterminée par les goûts du public, estimation faite par des sondages " techniques " des taux d'écoute, qui conditionnent le succès ou l'échec, et par voie de conséquence, les ressources financières. D'où un développement d'émissions de qualité inégale, au détriment d'émissions qui sauraient allier " éducatif " et " formateur " à l'humour et à la fantaisie. La Haute Autorité l'a, à juste titre, relevé dans un récent rapport: la notion de service public qui s'attache au monopole de la télévision interdit de ne considérer que la loi du profit et de la recherche de l'audience à tout prix.
Il convient donc que la télévision et la radio incluent dans leurs programmes des émissions éducatives bien faites et des émissions récréatives qui apportent des éléments d'enrichissement civique individuel et collectif. Les consommateurs ont bien leurs quelques minutes d'émission quotidienne pour les défendre. Pourquoi les administrés, les citoyens n'auraient-ils pas leur tribune, dans laquelle le médiateur trouverait parfois sa place ?
La recherche du " sensationnel " ne doit pas interdire la créativité intelligente en matière de formation du citoyen.
L'intérêt légitime porté aux événements du quotidien ne conduit pas forcément à stériliser les efforts à moyen et à long terme en faveur d'une société respectant mieux les droits et les devoirs nés du système démocratique. Certes, on peut évoquer ici l'action patiente menée par le centre d'information civique, à qui l'accès du petit écran n'est guère ouvert qu'en période préélectorale... Mais l'initiation à une " éducation civique élargie " telle que nous la préconisons exigerait, au niveau de la communication, des structures et des moyens dont ne dispose pas ce centre régi par la loi de 1901.
2° Les objectifs.
Au moment où notre pays, aux prises avec des difficultés, est confronté à un certain nombre de conflits au plan social, économique et politique, le rôle de l'information d'une opinion inquiète, soucieuse de connaître la vérité, revêt une importance capitale.
Plus que jamais l'impartialité doit être de mise, afin que puisse s'établir un dialogue sur des bases saines et une concertation débouchant sur un consensus porteur de paix civique.
Dans sa difficile lutte quotidienne, le citoyen exige d'abord la considération qu'on lui doit et qui exclut, dans l'information, le mensonge, même par omission, la facilité, l'à-peu-près, l'illusionnisme de la prévision hasardeuse.
D'où la nécessité, pour les responsables de l'information, de ne pas sacrifier la solidité du renseignement au désir de << brûler " les confrères; de ne pas présenter comme à la veille d'être mises en vigueur des décisions relevant d'un simple accord de principe en conseil des ministres; de ne pas recourir à tout bout de champ à des sondages d'opinion dont la signification dépend de la rédaction de la question posée—parfois de façon insidieuse-; de provoquer des enquêtes contradictoires; d'analyser davantage les travaux du Parlement et du Conseil économique et social, les propositions de réforme, au lieu de rapporter les seules appréciations- souvent partisanes - des leaders politiques.
Faire de l'information un moyen d'initiation à la vie sociale, économique et institutionnelle doit être une préoccupation des responsables à tous les niveaux, et de l'Etat au premier chef.
Ce qui nécessite:
- d'abord un changement de mentalité chez ceux qui gouvernent et chez ceux qui sont gouvernés;
- ensuite, une meilleure connaissance des problèmes qui préoccupent le citoyen et de sa réaction sur les projets (législatifs, réglementaires) en préparation, afin d'éviter pour l'avenir son indifférence sinon son hostilité;
- enfin, l'observation de l'image de marque de l'Etat auprès du citoyen. Est-elle mal ressentie, ou bien acceptée ?
D'où une triple démarche:
- éducation, formation, information sur les problèmes sociaux, économiques, politiques, institutionnels de l'heure, et les positions prises par le Gouvernement;
- campagnes préalables d'explication, de préparation, de dialogue sur telle ou telle option concernant la Communauté nationale;
- information a priori sur les choix du Gouvernement et les réalisations des pouvoirs publics.
Au-delà du quotidien, l'information doit porter sur les grands projets, telles la promotion des Droits de l'homme, et (pourquoi pas ?) la Déclaration des devoirs de l'homme; sur la construction européenne; sur l'indépendance énergétique, les réussites technologiques, l'aide au tiers monde, l'amélioration de l'environnement, etc.
Ce type d'action touche davantage la jeunesse. IL peut être de nature à mobiliser, et, par ce biais, à l'engager dans la vie sociale, économique et politique; à se situer, à prendre parti au lieu de se cantonner dans l'indifférence.
Dans le cycle scolaire et la formation professionnelle, l'utilisation de l'audiovisuel (télévision, cassettes vidéo) peut permettre l'engagement du dialogue.
Indépendamment des moyens médiatiques classiques, la vie associative permet d'utiliser les relais que constituent les groupes sociaux, professionnels, culturels, pour s'informer et s'exprimer. Dans son cadre familier, le citoyen futur ou adulte se livre davantage, s'exprime plus librement. L'information ne "tombe " plus comme une vérité révélée. Elle s'analyse, se critique, se discute.
3 ° Propositions.
L'information civique constitue une preuve du bon fonctionnement des institutions démocratiques, non seulement en en faisant mieux connaître les rouages, mais encore en fournissant à chacun des bases et des points de repère lui permettant d'exercer sa liberté de choix.
Elle doit donc être véhiculée par l'ensemble des moyens modernes d'information, sans être réduite à une expression temporaire, au moment des grandes confrontations électorales.
Par exemple, un débat sur les différents modes de scrutin permettrait de mieux les connaître, mieux les apprécier, et faciliterait les exposés et les commentaires sur le mode utilisé lors de l'ouverture d'une campagne électorale.
Toute émission d'information sur les droits, les devoirs des citoyens, sur leur initiation à la vie active doit, sans sous-estimer la faculté de compréhension des auditeurs, proscrire tout aspect hermétique toute appellation (sigle, abréviation) réservée aux initiés, et user d'idées et d'expressions claires. La présence de citoyens témoins invités à l'émission permettrait de mieux tester son intérêt et son impact. Les réactions de l'ensemble des auditeurs seraient ainsi mieux perçues.
Pour la mise en oeuvre des programmes éducatifs, des émissions récréatives " à message ", des spots informatifs, etc., un certain nombre d'initiatives et de mesures devraient être prises par la Haute Autorité de l'audiovisuel et les ministères concernés;
- mise en place d'une cellule de réflexion et prospective et propositions pour tout ce qui concerne la conception de l'information sur le civisme et les relations avec le public;
- indispensable coordination au niveau des départements ministériels afin d'harmoniser ces initiatives;
- élaboration de programmes d'information civique et réalisation de ceux-ci en liaison avec les médias, en vue de leur diffusion auprès d'établissements et centres formateurs des jeunes et des adultes;
- désignation dans tous ces établissements d'un animateur coordonnateur des actions à entreprendre;
- étude des modes de diffusion de l'information civique afin de la rendre efficace et attractive: séquences courtes, humoristiques ou récréatives; interviews, bandes dessinées, jeux télévisés, etc.;
- insertion dans les programmes radio et télévision de créneaux horaires situés entre deux émissions de grande écoute, avec spots de style " publicitaire ";
- association des collectivités (régions, départements et communes) à cet effort d'information par l'organisation de jeux, de concours avec récompenses
- émissions fonctionnant comme des cours par correspondance, avec correction des réponses envoyées par les auditeurs ou téléspectateurs.
L'élaboration de ces programmes devrait faire l'objet de concertations entre le ministère de l'éducation nationale, le secrétariat à la formation professionnelle, le secrétariat à la communication, le centre d'information civique et tous autres organismes nationaux habilités à promouvoir l'éducation et l'information civique.
Il est suggéré de généraliser les protocoles d'accord interministériels du genre de celui signé en septembre 1982 entre le ministre de la défense et le ministre de l'éducation nationale, qui met l'accent sur l'établissement de relations régulières entre les ministères et les cadres des deux communautés, militaire et scolaire, en vue d'une meilleure information des élèves sur les problèmes de défense et, réciproquement, l'information des militaires du contingent sur leur insertion dans la vie professionnelle.
CONCLUSIONS
Le présent rapport constitue une première approche du problème: comment être citoyen.
Les propositions formulées doivent faire l'objet d'un examen attentif par les pouvoirs publics, les formations politiques, syndicales, professionnelles, les responsables de l'information, en prélude au débat public en profondeur que mérite ce sujet crucial.
Dans la pratique, ce débat devrait alimenter un colloque, où seraient conviés les organismes à vocation civique, les enseignants, les parents, les sociologues, les politologues, les représentants des médias, etc.
Parmi les solutions à étudier en priorité:
La création d'un organisme de conception et de coordination de la tâche à entreprendre dans le domaine de l'éducation civique (ou la modification des statuts et l'accroissement des attributions du Centre d'information civique).
La création d'une fondation dotée des moyens appropriés à prendre en charge cette mission, et pouvant bénéficier des avantages du mécénat.
L'ouverture d'un grand débat sur le civisme à l'échelle européenne, ainsi que je l'ai proposé en octobre 1982 au colloque de Sienne sur la promotion des Droits de l'homme organisé par le Conseil de l'Europe. Débat qui sera repris et élargi lors de la 3e Conférence internationale des Ombudsmans et Médiateurs qui se tiendra à Stockholm en juin 1984.
Durant toute ma vie active, dans l'exercice de mes mandats de maire, de conseiller général, de parlementaire, de responsable d'une formation politique, je n'ai cessé de rappeler l'impérieuse nécessité d'un renouveau des valeurs civiques et morales qui ont fait la force de notre démocratie et assuré sa pérennité.
Depuis 1980, devenu Médiateur de la République, j'ai, dans de multiples articles de presse, à chaque occasion d'intervention radiodiffusée ou télévisée, lancé des appels en faveur d'un renouveau du civisme.
Dans chacun de mes rapports annuels au Président de la République et au Parlement, j'ai dénoncé avec force le matérialisme, l'esprit d'assistance, l'égoïsme, et préconisé le " retour à l'enseignement des valeurs immuables qui permettent la vie en société et que l'on peut nommer tantôt l'instruction civique, tantôt la morale, tantôt, tout simplement, l'éducation " (rapport pour l'année 1983).
Je craignais d'être peu entendu, car " il est toujours désagréable d'être Cassandre ".
Mais j'estimais que mon devoir était, sans me lasser, de lancer encore un nouvel appel, de participer à une " campagne de réflexion, de prise de responsabilité, de solidarité et de fraternité qui, seule, peut éloigner la perspective de l'abandon et nous rendre quelque confiance dans l'avenir ".
Ce message a été reçu. Non seulement par les personnalités qui ont collaboré à l'élaboration de ce rapport, mais par de hauts responsables du monde de la pensée, des religions, et même de la politique.
Je me réjouis de l'écho que trouvent dans l'opinion mes suggestions, reprises et amplifiées par les voix les plus autorisées.
Des initiatives sont prises par diverses associations, organisations et ligues, qui envisagent séminaires, colloques, chartes, etc.
Sans doute une coordination de ces généreux projets est-elle souhaitable, et le médiateur peut y avoir sa part. Mais l'important, c'est que la semence germe enfin et que l'élan soit donné. Nous ne serons jamais trop nombreux pour amorcer et réussir le profond changement de mentalité qu'impliquent ces efforts, pour doter enfin les Françaises et les Français d'un grand dessein, un véritable projet de société qui concilie réalisme et idéalisme.
Le Médiateur de la République,
ROBERT FABRE.
REMERCIEMENTS
Ce rapport spécial découle tout naturellement des multiples propositions que j'ai énoncées dans mes successifs rapports annuels sur le thème du nécessaire renouveau de l'éducation civique.
Mais sa réalisation, née d'un échange de vues concordant avec le père Maurice Rieutord, est le fruit d'un travail préparatoire collectif auquel ont pris part, sous des formes diverses, de hautes personnalités particulièrement qualifiées, dont l'expérience a été précieuse.
Les unes ont assumé la responsabilité de groupes de travail, telles Mmes Manodritta et Rey, Maurice Rieutord et Jean Christian Barbé.