Aujourd'hui, ce type de réunions n'est plus une exception,
et les permanences des services fiscaux, dans les semaines précédant
la date limite de déclaration des revenus, ont été
généralisées. Il en va de même pour
les impôts locaux, au moment de la réception des
avis d'imposition.
Les services administratifs des collectivités locales favorisent
aussi, aujourd'hui, cette information, les chambres de commerce
et d'industrie tendant pour leur part à sensibiliser les
chefs d'entreprises à ces questions.
B. MANQUE DE LISIBILITÉ
DES TEXTES
" Nul n'est censé ignorer la loi ", selon l'adage
classique. Mais connaître le texte applicable à une
situation donnée ne suffit pas, il faut pouvoir le comprendre.
Or, bien souvent, en raison de renvois à des annexes, d'utilisation
de sigles non explicites, ou par l'effet de trop nombreuses modifications,
les textes perdent de leur sens, et l'administré reste
démuni.
Ainsi, par exemple, dans sa proposition PRM 88-04, le Médiateur
de la République demandait que, lorsqu'un texte publié
au Journal officiel renvoie à une ou des annexes, ce même
texte indique également le document où ces annexes
sont insérées, la date de sa publication et l'adresse
où il est disponible.
Un mois après la formulation de la proposition, le secrétaire
général du Gouvernement donnait une réponse
pleinement favorable, conscient du caractère anormal d'un
texte renvoyant à des annexes introuvables.
C'est le même souci de lisibilité et de meilleure
compréhension des textes qui est à l'origine de
la proposition ENV 89-02.
Le Médiateur de la République avait remarqué
que, de plus en plus fréquemment, les textes publiés
au Journal officiel contenaient des sigles, sans que ceux-ci soient
toujours explicites. Seuls les initiés pouvaient alors
comprendre la teneur du texte.
Le Médiateur a donc proposé qu'à l'avenir,
toutes dispositions utiles soient prises afin que les sigles,
lorsque leur utilisation est justifiée, soient systématiquement
développés dès leur première mention
dans le corps d'un texte, que le texte soit ou non destiné
à la publication dans l'un des bulletins officiels.
Dans l'année même de cette proposition de réforme,
plusieurs arrêtés publiés au Journal officiel
ont tenu compte des recommandations du Médiateur de la
République.
La réforme RAG 90-01 présentée le 9 avril
1990 est plus ambitieuse encore : des textes, généralement
des décrets, apportent de nombreuses modifications, parfois
très courtes, à un dispositif initial. Un grand
nombre d'articles se trouvent concernés, de sorte que l'énumération
de modifications minimes ne permet pas de comprendre le dispositif
issu de la nouvelle réglementation.
Trois voies étaient alors proposées par le Médiateur
:
- publier en annexe le texte actualisé, sur le modèle
adopté par l'Union européenne en matière
de modification de règlement. Cette mesure, qui alourdit
les coûts de publication du Journal officiel, devait bien
entendu être réservée aux cas les plus utiles;
- mentionner dans le corps du texte l'existence d'une annexe comprenant
l'ensemble des modifications, et donner toutes informations utiles
à son obtention;
- indiquer l'existence, ou la prochaine publication, d'une brochure
reprenant le ou les textes actualisés. La direction des
Journaux officiels publie en effet de nombreuses brochures de
ce type.
Le secrétariat général du Gouvernement a
très rapidement répondu favorablement à la
proposition du Médiateur de la République. Depuis
janvier 1991, le Journal officiel mentionne soit la publication
de la version intégrale actualisée dans la collection
des textes d'intérêt général, soit
la référence à la brochure existante.
C. EXCÈS DE FORMALITÉS
L'excès de formalités constitue un élément
important de complexité administrative rencontrée
par le Médiateur de la République dans son action
quotidienne.
Il arrive parfois qu'une démarche simple soit alourdie
par la multiplication des formalités requises, ou bien
que les mêmes conditions formelles soient exigées
à différents stades d'une procédure unique.
Cette situation peut conduire à l'exclusion de certains
administrés, dans la mesure où l'excès et
la complexité exigés les incitent à renoncer
à toute demande.
C'est dans cette perspective que, dès 1980 (proposition
JUS 80-08), le Médiateur de la République a proposé
une réforme importante dans le domaine fondamental de l'accès
à la justice.
Le Médiateur avait remarqué, à l'occasion
du traitement de plusieurs réclamations qu'une disparité
existait quant à la saisine du juge en matière fiscale.
Le contribuable saisissant le juge administratif en matière
d'impôts directs et de TVA pouvait le faire par lettre simple.
En revanche, le contribuable saisissant le tribunal de grande
instance en matière de droits d'enregistrement, de timbre,
ou de contributions indirectes, devait obligatoirement recourir
à un huissier.
Aucune raison de fond ne justifiait cette disparité, et
la séparation des deux ordres de juridiction ne devait
pas conduire à dérouter les justiciables. De plus,
le recours à l'huissier s'accompagnait d'un échange
de courriers formels, nécessaires dans les relations avec
les officiers publics.
Le Médiateur de la République proposait donc qu'on
aligne ces procédures sur la plus simple d'entre elles,
celle suivie devant le juge administratif.
Le garde des sceaux et le ministre du budget se sont tous deux
montrés favorables à cette réforme, propre
à faciliter le recours à la justice. L'obligation
du ministère d'huissier en matière fiscale, devant
le tribunal de grande instance, a donc été supprimée,
conformément aux voeux du Médiateur.
Aujourd'hui, de nouvelles propositions de réforme qui participent
à la lutte contre l'exclusion résultant de la complexité
administrative restent à l'étude, comme, par exemple,
l'amélioration des notifications des décisions de
refus de bourse d'enseignement supérieur, notamment par
l'indication des voies et délais de recours (proposition
95-R003).
Enfin, il convient de souligner que, dès 1974, le Médiateur
de la République avait suggéré qu'une réflexion
approfondie soit conduite sur l'ensemble du problème de
ce qu'il est convenu d'appeler " la transparence administrative
", c'est-à-dire l'accès des citoyens aux travaux
et documents des services publics.
À la suite des travaux de la commission de coordination
de la documentation administrative et des rapports publiés
ainsi que de l'étude de M. BRAIBANT, Mme QUESTIAUX et M.
WIENER " Le contrôle de l'Administration et la protection
du citoyen ", le Médiateur de la République
déclarait en 1975 aux pouvoirs publics qu'avec l'expérience
acquise depuis 1973, il était temps de prendre, dans les
domaines de l'accès aux documents administratifs et de
la motivation des décisions, les dispositions qui s'imposaient.
Trois lois ont répondu aux demandes exprimées :
- la loi no 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique,
aux fichiers et aux libertés;
- la loi no 78-753 du 17 juillet 1978, portant diverses mesures
d'amélioration des relations entre l'Administration et
le public qui a mis en place la commission d'accès aux
documents administratifs, chargée notamment de formuler,
dans le délai d'un mois à compter de sa saisine,
un avis sur la communicabilité des documents administratifs;
- la loi no 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation
des actes administratifs et à l'amélioration des
relations entre l'Administration et le public.
Les transformations apportées par ces trois lois dans les
relations de l'Administration avec le public n'ont pas besoin
d'être soulignées. Le Médiateur a sans doute
contribué à inciter les pouvoirs publics à
prendre les dispositions qui s'imposaient.
Un grand pas vers une Administration plus accessible, en particulier
en faveur des personnes démunies, avait été
franchi.
D'autres progrès restaient à accomplir.
Le Médiateur de la République le notait dans son
rapport 1994 : la modernisation de l'Administration, les progrès
des procédés automatisés, de l'informatique
s'accompagnent d'une complexité parfois grandissante des
systèmes de fonctionnement.
Les satisfactions que l'on en tire sont réelles : exactitude
des résultats, gestion rationalisée... En revanche,
il faut prendre garde, dans certaines circonstances, à
l'absence de traitement personnalisé de situations qui
peuvent conduire à l'exclusion : en effet, dans les catégories
touchées par l'illettrisme, démunies de la connaissance
des procédures et des rouages administratifs, des personnes
en situation précaire sont impuissantes à obtenir
la reconnaissance de leurs droits et ne comprennent pas que l'Administration
ne soit pas en mesure de prévoir certains risques d'erreurs
ou d'iniquités.
Les cas de cette espèce rencontrés par le Médiateur
de la République sont nombreux, et celui-ci s'efforce à
la fois d'aider les intéressés dans leurs démarches,
notamment sur la base de l'équité, et de faire úuvre
pédagogique, en prenant le temps de leur fournir une explication
détaillée et personnalisée.
Le service public doit rester, à cet égard, un lieu
transparent d'intégration et de citoyenneté. C'est
une tâche immense, à laquelle le Médiateur
entend participer pleinement et activement.
III. LE RISQUE D'EXCLUSION
LIÉ À CERTAINES PROCÉDURES JUDICIAIRES COMPLEXES
L'exclusion peut aussi résulter d'obstacles rencontrés
pour saisir une juridiction, se faire reconnaître l'existence
d'un droit.
Le Médiateur a eu l'occasion, dans le cadre de son rapport
d'activité de l'année 1994, de rappeler que la Convention
européenne des droits de l'homme affirme notamment le droit
de chacun d'avoir accès à un tribunal et de voir
sa cause entendue dans un délai raisonnable.
Malgré l'élargissement du champ de l'aide juridique
et les mesures législatives destinées à améliorer
la réponse apportée à la demande de justice,
certaines procédures judiciaires demeurent lourdes, archaïques
et complexes et peuvent être facteur d'exclusion : il s'agit,
par exemple, des procédures de répartition du produit
de la vente de biens à la suite d'une saisie immobilière.
La saisie immobilière, qui aboutit à la vente sur
adjudication d'un bien immobilier, intervient à la suite
d'un long processus qui, souvent, a commencé par les difficultés
rencontrées par un ménage pour régler les
mensualités d'un crédit contracté pour acquérir
un bien immobilier.
Ces difficultés peuvent surgir à l'occasion d'un
divorce, d'une perte d'emploi, d'une période de chômage
suivie d'une reconversion moins rémunératrice...
Lorsque cette procédure de saisie immobilière se
termine par la vente aux enchères du bien immobilier, les
frais sont extrêmement importants, qu'il s'agisse des conséquences
du contrat de prêt ou des frais de la procédure elle-même.
Les difficultés financières initiales seront donc
aggravées par la mise en úuvre de la procédure
de saisie immobilière, qui est formaliste et donc extrêmement
coûteuse.
Les droits du créancier qui a prêté les deniers
nécessaires à l'acquisition immobilière doivent
être préservés, mais les poursuites qu'il
engage doivent être proportionnées au montant de
la créance à recouvrer.
Les textes régissant la procédure de saisie immobilière
et la procédure d'ordre destinée à répartir
le produit de la vente sont si complexes que les règles
applicables ne sont connues que de quelques professionnels.
Ceux-ci sont plus souvent les conseils des organismes de crédit
que ceux du débiteur qui, par définition, est démuni
de ressources puisque la vente de son patrimoine immobilier est
poursuivie.
Une réforme de ces procédures est en préparation
depuis plus de dix ans, mais n'a toujours pas été
engagée.
La procédure de distribution ou de répartition du
produit de la vente du bien est également archaïque
et il sera parfois difficile, pour le débiteur, d'obtenir
que le solde du produit de la vente qui n'est pas absorbé
par les créanciers lui soit versé.
À titre d'exemple, l'attention du Médiateur de la
République a été attirée sur la situation
de M. P... qui, après avoir exercé pendant de longues
années un emploi de maître d'hôtel dans un
établissement prestigieux, a perdu son emploi à
la suite de la cessation d'activité de cet établissement.
Pendant qu'il exerçait cette activité, il a acquis
cinq biens immobiliers. Par la suite, il a créé
une activité commerciale qui, rapidement, s'est trouvée
déficitaire et chacun de ses biens immobiliers a été
successivement vendu aux enchères.
Il a aujourd'hui pour seules ressources le revenu minimum d'insertion.
Le créancier qui avait poursuivi la vente de l'un des biens
a obtenu, à la suite de la vente sur adjudication, une
provision lui permettant d'être réglé quasi
intégralement de sa créance. Depuis 1983, il restait
un solde disponible pour M. P... d'environ 55 000 F.
Un arrêt de la cour d'appel de Paris a été
nécessaire pour fixer les droits respectifs du créancier
et du débiteur; cet arrêt a été prononcé
en 1993. Malgré cette décision, M. P... n'avait
toujours pas, courant 1995, perçu le solde qui lui revenait.
De l'analyse du dossier, il est apparu que diverses démarches
nécessaires pour que l'organisme consignataire débloque
les fonds n'avaient pas été accomplies.
En raison de la complexité de la procédure, qui
nécessite l'intervention de professionnels spécialisés
que M. P... n'avait pas eu les moyens de mandater, il n'avait
pas perçu cette somme, qui lui aurait été
bien utile et qui lui aurait peut-être permis de désintéresser
d'autres créanciers et ainsi d'éviter la vente du
dernier de ses biens.
Le Médiateur l'a aidé dans ces démarches
et le déblocage des fonds est intervenu.
IV. LA FISCALITÉ ET
L'EXCLUSION : RAPPEL
Le Médiateur avait déjà consacré un
chapitre de son rapport 1994 à cette question, dont nous
nous bornons ici à récapituler les éléments
les plus significatifs.
La contribution fiscale du citoyen est complexe dans un État
de droit comme la France, où la fiscalité est aussi
un instrument de redistribution sociale et d'incitation économique.
La participation des citoyens à l'impôt se fonde
sur l'égalité devant les charges publiques, grand
principe de la République selon lequel chaque personne
paie l'impôt selon ses facultés contributives, c'est-à-dire
essentiellement en fonction du revenu et du patrimoine dont elle
dispose.
L'appellation de " contribuables en situation d'exclusion
sociale " peut donc conduire à associer des notions
apparemment antinomiques.
En effet, les personnes que l'on regroupe généralement
selon des critères assez divers, sous le qualificatif d'"
exclus ", présentent une caractéristique commune
qui est la grande précarité de leurs conditions
matérielles de vie.
Pourtant, la loi fiscale n'a sans doute jamais été
autant qu'aujourd'hui protectrice des intérêts des
personnes disposant de faibles ressources.
Il apparaît ainsi qu'en raison, à la fois du relèvement
annuel du seuil d'imposition sur le revenu et de divers abattements,
déductions, minorations et exonérations liés
soit à la situation personnelle du contribuable, soit à
la nature des revenus perçus, ce sont environ 50 %% des
foyers qui ne paient pas d'impôt sur le revenu.
À plus forte raison, les personnes que les circonstances
de la vie ont placées en situation d'exclusion sociale
sont donc bien sûr exonérées de toute contribution
fiscale.
Parallèlement - et c'est peut-être l'un des traits
les plus préoccupants de notre société où
les amortisseurs sociaux se montrent parfois défaillants
-, il est des circonstances qui conduisent, en quelques mois,
d'une vie sociale et professionnelle normale à l'exclusion.
Or, si dans de tels cas, les cotisations d'impôt sur le
revenu ou d'impôts locaux restant dues sont susceptibles
de donner lieu à remise par le service des impôts,
par voie de réclamation gracieuse, il n'en va pas de même
en matière de taxe sur la valeur ajoutée ou de droits
d'enregistrement.
En effet, selon les dispositions du dernier alinéa de l'article
L 247 du Livre des procédures fiscales, " aucune autorité
publique ne peut accorder de remise totale ou partielle de droits
d'enregistrement, de taxe de publicité foncière,
de droit de timbre, de taxe sur le chiffre d'affaires, de contributions
indirectes et de taxes assimilées à ces droits,
taxes et contributions ".
Dans les faits, c'est essentiellement en matière de TVA,
pour d'anciens commerçants ou artisans devenus totalement
insolvables, que va se poser cette difficile question du recouvrement
de l'impôt.
Ces personnes, même en situation d'exclusion sociale, demeurent
légalement redevables de la TVA au titre d'une activité
professionnelle antérieure. Elles seront donc poursuivies
en paiement de leurs dettes fiscales par les comptables publics
compétents, c'est-à-dire les receveurs des impôts.
Cette rigueur particulière de la loi s'explique par le
fait que la TVA a bien été payée par le client
au commerçant qui l'a encaissée pour le compte de
l'État; la taxe collectée doit donc être reversée
quelles que soient la situation personnelle du commerçant
ou les raisons qui ont conduit à sa cessation d'activité.
Cela étant, on peut s'interroger sur les effets des actions
de recouvrement forcé menées envers les contribuables
en situation d'exclusion sociale, étant précisé
que la contrainte par corps, c'est-à-dire l'emprisonnement,
ne s'applique pas dans ces cas-là.
Concrètement, il est clair que les poursuites engagées
selon la procédure habituelle (avis de payer, commandement
de payer, saisie puis vente des biens) s'avéreront inopérantes,
les débiteurs ne possédant ni ressources, ni biens,
ni même parfois de domicile fixe où ces actes de
poursuite les toucheraient.
Pourtant, ces contribuables ne doivent pas se désintéresser
de leur situation fiscale au motif que leur manquement contributif
serait sans incidence pour eux, en raison de leur insolvabilité
totale. Les dettes fiscales dont ils restent redevables sont en
effet susceptibles de constituer un lourd handicap à leur
réinsertion professionnelle et sociale, puisque les premières
ressources qu'ils percevront seront frappées d'opposition
par le receveur des impôts, si aucune mesure n'est venue
régulariser, même provisoirement, leur situation
de recouvrement. La publicité qui entoure inévitablement
toute mesure de poursuite, notamment à l'égard de
l'entourage professionnel, peut gêner la réussite
de la réinsertion sociale des intéressés
à un moment où elle demeure fragile.
C'est pourquoi les contribuables en situation d'exclusion sociale
doivent faire cesser les poursuites fiscales exercées à
leur encontre.
Cette démarche est cependant difficile à mener,
s'agissant de personnes totalement démunies de moyens,
en raison surtout des dispositions légales qui, en l'espèce,
interdisent l'octroi de toute mesure gracieuse.
La procédure administrative, appelée " admission
en non-valeur ", fait disparaître la prise en charge
de l'imposition dans les livres du comptable, sans toutefois modifier
les droits de l'État à l'encontre du débiteur,
ce qui signifie qu'elle ne libère pas le contribuable qui
reste légalement redevable des impositions dues, notamment
en cas de retour à meilleure fortune. L'admission en non-valeur
est donc de nature à répondre parfaitement aux préoccupations
des contribuables en situation d'exclusion, puisque :
- elle est mise en úuvre lorsque le recouvrement de l'impôt
parfaitement justifié en droit, s'avère en fait
impossible, notamment en raison de l'insolvabilité du redevable;
- elle a pour effet de faire cesser les poursuites dès
lors qu'elle est destinée à dégager la responsabilité
personnelle du comptable dans le recouvrement des impôts
dont il a la charge.
Le Médiateur de la République, saisi de réclamations
dans lesquelles des redevables de TVA sont victimes d'une situation
d'exclusion sociale, a la faculté de demander à
l'Administration d'admettre l'impôt impayé en non-valeur.
Cette démarche suppose néanmoins que les pièces
jointes à la réclamation puissent permettre au Médiateur
de s'engager auprès de l'administration fiscale pour solliciter
le bénéfice de l'admission en non-valeur, mesure
au demeurant exceptionnelle et que le comptable public concerné
tarde souvent à prendre, faute d'être en possession
d'éléments suffisamment probants attestant l'insolvabilité
totale du redevable.
Enfin, il faut souligner que seul le Médiateur de la République
peut, dans certains cas, suggérer à l'administration
fiscale la mise en úuvre de la procédure d'admission
en non-valeur d'une créance fiscale détenue par
l'État.
Cette mesure comptable, bien que de nature purement administrative,
peut être utilement invoquée par le Médiateur
en faveur des contribuables en situation d'exclusion sociale,
conformément aux dispositions de l'article 9 de la loi
du 3 janvier 1973 instituant sa fonction et qui prévoient
que, " lorsqu'une réclamation lui paraît justifiée,
le Médiateur de la République fait toutes les recommandations
qui lui paraissent de nature à régler les difficultés
dont il est saisi... "
D'ailleurs, l'examen des réclamations reçues montre,
pour ces affaires particulièrement difficiles, que l'administration
fiscale, souvent dans un but purement humanitaire, sait réserver
un accueil favorable aux demandes d'admission en non-valeur que
lui adresse le Médiateur de la République.
V. LES EXCLUSIONS DUES À
DES HANDICAPS
La question des exclusions consécutives à la perte
d'emploi et aux problèmes rencontrés dans l'indemnisation
du chômage étant traitée par ailleurs dans
le présent rapport 1995 (chapitre IV " Le Médiateur
et les organismes d'assurance-chômage "), il convient
de revenir sur les exclusions qui peuvent être liées
à divers handicaps.
Dans son rapport pour l'année 1993, le Médiateur
de la République s'était en effet attaché
à mettre en lumière ce problème spécifique.
Le Médiateur de la République avait constaté
que l'accueil des handicapés dans les différents
types d'établissements était rendu plus ou moins
complexe selon que leur financement est assuré par l'État,
la sécurité sociale ou les départements,
voire parfois l'assurance maladie.
Trop de difficultés subsistent en ce qui concerne l'insuffisance
des lieux d'accueil, le financement du séjour des handicapés
ou l'agrément des accueils familiaux ou associatifs.
Il faut également rappeler que si les efforts des pouvoirs
publics pour attribuer des ressources suffisantes aux handicapés
ou à leurs familles sont importants, les cinq allocations
ou aides qui leur sont destinées pâtissent d'une
information insuffisante et de la difficulté de coordonner
la gestion de ces prestations.
Ainsi, c'est parfois tardivement, après plusieurs mois
ou années, que des parents, affectés par la naissance
d'un enfant handicapé, demandent l'attribution d'une prestation,
faute d'avoir eu connaissance de son existence.
Enfin, le Médiateur veut souligner à nouveau que,
s'agissant de l'intégration scolaire et universitaire des
jeunes handicapés, les réclamations qui lui sont
soumises traduisent à la fois les difficultés que
rencontrent les familles face à des interlocuteurs quelquefois
insuffisamment sensibilisés aux démarches d'intégration,
mais aussi les difficultés inhérentes à la
démarche elle-même qui repose sur la nécessité
d'élaborer avec un ensemble de partenaires, pour chaque
enfant concerné, un projet individuel adapté, et
évidemment évolutif.
Destinataire des réclamations concernant, dans leurs relations
avec les citoyens, le fonctionnement des administrations de l'État,
des collectivités locales, des établissements publics
et de tous autres organismes investis d'une mission de service
public, le Médiateur de la République a eu à
connaître, depuis sa création, les difficultés
les plus diverses nées de situations de grande précarité
et, parfois, d'exclusion.
Sans doute le Médiateur n'est-il pas la seule institution
à porter une attention soutenue aux situations d'exclusion
et à tenter d'y porter remède. Le Gouvernement,
le Parlement sont, à travers leurs relais propres et leurs
moyens humains et financiers, témoins et acteurs essentiels
de la lutte à mener contre la fracture sociale. Les associations
caritatives ont aussi, de leur côté, un rôle
primordial à jouer pour détecter, révéler,
alerter, agir. Elles le font avec un dévouement exceptionnel,
que le Médiateur a pu constater à maintes reprises,
au niveau national, avec notamment de grandes campagnes de sensibilisation,
comme sur le terrain, quotidiennement.
Mais la bataille contre l'exclusion commande une mobilisation
générale, une volonté de tous les instants
et de tous les acteurs, une coordination efficace des moyens de
prévention et de lutte.
Le Médiateur de la République, fort de son statut,
de son indépendance, du nombre croissant de situations
rencontrées, de ses contacts multiples, de son sens aigu
de l'équité nourri à l'épreuve des
faits depuis vingt-deux ans, doit prendre toute sa place dans
le dispositif qui permettra de relever l'un des défis majeurs
de cette fin de siècle.
Disposant d'une expérience de traitement personnalisé
des dossiers, de la faculté de formuler des recommandations
et des propositions susceptibles d'améliorer le fonctionnement
des organismes publics, du pouvoir de suggérer des modifications
des textes législatifs et réglementaires dont l'application
aboutit à une iniquité, le Médiateur accomplit
une fonction importante en faveur de l'adaptation, la lisibilité,
la compréhension, la simplification, l'équité
de la réglementation sociale, de ses procédures
et de ses mécanismes.
Hélas, il y a aussi tous les cas qui ne parviennent pas,
qui ne peuvent plus parvenir à une institution comme celle
du Médiateur, du fait de l'ignorance même de son
existence, de l'épuisement, du désespoir des personnes
concernées.
C'est bien pourquoi la lutte qui s'impose pour faire reculer ce
fléau de l'exclusion revêt un caractère permanent
et requiert l'attention et la volonté de tous.
Le Médiateur de la République a décidé
d'y jouer un rôle, d'y consacrer du temps, des moyens, de
l'énergie, en restant à l'écoute non seulement
des personnes qui le saisissent, mais aussi des associations humanitaires
et caritatives, et en liaison étroite avec les pouvoirs
publics.
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